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    Ceux qui nous ont quittés

    Tisser ensemble de nouveaux liens pour une nouvelle aventure

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    Joni Payuk

    Joni Payuk, cicm
    Missionnaire en Indonésie

     

    Nous sommes frères. Nous prononçons nos vœux ensemble dans notre Institut en présence de notre Supérieur et de l'Église. Nous vivons du même charisme et de la même spiritualité. Nous avons partagé la même formation en référence aux Constitutions de l'Institut et du Directives générales pour la Formation initiale. C'est ainsi que coule dans nos veines le même « sang de l'esprit missionnaire » qui nous offre la possibilité de partir, en laissant derrière nous nos chères familles. Cet esprit missionnaire est la source qui nous permet d’avancer ensemble comme des frères sur le terrain de la mission.

    Notre Fraternité CICM

    « Missionnaires religieux de différentes races et cultures, nous vivons et travaillons ensemble comme des frères. 'Un seul cœur, une seule âme', nous témoignons de la fraternité universelle dans le Christ, voulue par le Père. Nous sommes signe de la solidarité des Églises particulières dans leur mission universelle. » Const. Art. 2, #3.

    « La communion fraternelle exige que nous nous soutenions mutuellement et que nous manifestions un réel intérêt pour la personne et le travail de chacun de nos confrères. Nous prions les uns pour les autres et pour notre Institut. » Const. Art. 50.

    Ces deux Articles de nos Constitutions CICM ont en quelque sorte souligné l'aspect vital que nous devrions toujours privilégier en tant que missionnaires. C'est notre engagement fraternel. Pourquoi? Ce n'est qu'à travers une relation profonde entre nous, par la vie religieuse, que nous devenons des signes eschatologiques pour le monde. Nous nous lions dans la vie religieuse sous la bannière de CICM. Individuellement et en tant que communauté, nous avons des histoires de naissance, de luttes et de succès, de peurs et d'échecs, des histoires que nous héritons de chez nous. Nous avons des histoires institutionnelles et communautaires locales. Il faut s'en souvenir et les raconter. Ces histoires doivent être racontées pour que d'autres s'en souviennent. Pourtant, elles ne peuvent pas toutes être dites sans discrétion, ni à tout le monde, ni de manière à nous enfermer dans un passé révolu. Cependant, nous devons trouver des moyens de nous souvenir de ce qu'il ne faut pas oublier et de le raconter afin que cela devienne une source de renouveau pour chacun de nous. (Anthony J. Gittins, Reading the clouds).

    C'est ce que nous appelons ritualiser nos histoires personnelles dans la communauté. Ce faisant, nous considérons que les histoires de nos vies sont sacrées parce qu'elles font partie de notre développement personnel en tant qu'être humain. Ce n'est pas quelque chose que d'autres peuvent faire pour nous. Au sein de nos groupes aux fragilités diverses, nous devons discerner ensemble pour trouver nos propres besoins fondamentaux, déterminer ce à quoi nous accrocher et ce qu'il faut lâcher ; qu'est-ce qui donne la vie et qu'est-ce qui donne la mort ; ce qu'il faut transmettre et ce qu'il faut effacer. Dans l'unité et en communauté, nous tissons les fils que nous pouvons utiliser pour lier nos vies comme des frères dans le passé, le présent et l'avenir. C'est ce que l'on apprend dans le cadre d'une formation interculturelle avant de partir en mission.

    Le tissage de notre fraternité exige un sacrifice particulier de la part de chacun de nous. Il ne suffit pas de venir s'asseoir ensemble une fois par semaine pendant le temps des loisirs communautaires et de se dire ensuite que nous cultivons ainsi notre fraternité. Nous devons aussi sacrifier notre temps et notre confort personnel pour être avec nos frères. L’excuse commune est que nous sommes fort « occupés ». Mais si nous désirons voir la réalisation du rêve d’une Congrégation qui continue à exister afin de participer à l’annonce de la Bonne Nouvelle au monde, alors nous devons vivre notre fraternité. Martin Luther King Jr. a dit un jour à ses compagnons : « Nous devons vivre ensemble comme des frères ou périr ensemble comme des imbéciles. »


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    Fraternité sur le terrain

    L'image forte que l'on voit souvent dans les films est celle de deux frères ou plus, se scarifiant la paume de la main avec un couteau, se serrant les mains pour mélanger ce sang, ils se promettent la fidélité à cette fraternité quoi qu'il puisse arriver. Ils continuent à se soutenir mutuellement jusqu'à leur dernier souffle, de la même manière dans l'histoire de la petite enfance de sainte Thérèse d'Avila, où, avec son frère cadet, Rodrigo, ils font vœu de devenir martyre. Ils ont donc quitté leur maison et sont partis vers l'Afrique.

    Dans l’Evangile Jésus envoie ses disciples deux par deux dans les villages pour annoncer la Bonne Nouvelle. Il leur ordonne de ne rien prendre pour leur voyage sinon un bâton ; pas de pain, pas de sac et pas d'argent dans la ceinture. Ils peuvent porter des sandales mais ne pas emporter une deuxième tunique. (Mc 6, 7-9) Peut-être Jésus voulait-il qu'ils aient les mains vides et qu’ils se soutiennent mutuellement dans la joie. Les mains vides, ils pourront mieux serrer les mains de ceux qu’ils rencontreront. La main nue, ils pourront mieux sentir la chaleur de la paume des autres. Ils réaliseront l’unité dans la fraternité. Vers la fin de sa vie, il a partagé avec ses disciples la table de communion où il a donné des instructions précises : « Faites ceci en mémoire de moi. » Dans un autre passage : « Il s'est levé de table, a enlevé ses vêtements de dessus et s'est enroulé une serviette autour de la taille. Après cela, il a versé de l'eau dans une bassine et a commencé à laver les pieds de ses disciples, les séchant avec la serviette. Et il déclara : « …désormais, je ne vous appellerai plus des serviteurs mais mes amis. » En d'autres termes, ils sont devenus des compagnons intimes de Jésus (Jean 13.4).

    Au moment voulu, nous sommes envoyés par la Congrégation pour travailler ensemble en tant que frères dans la mission. Notre rêve de Mission, avec toutes ses impatiences s'est alors heurté à la réalité. Nous avons rencontré des confrères qui sont différents de nous et nous avons senti que nous n'étions pas tout à fait prêts pour vivre avec eux. Nous sommes alors mis au défi d'accepter cette réalité en confessant qu'à partir de ce moment, ils sont mes confrères pour la mission. Quoi qu'il arrive, ce sont eux mes frères dans la mission, car nous sommes tous envoyés par notre Congrégation. Nous sommes partis en mission les mains vides pour nous tendre la main les uns aux autres. Nous devons sacrifier nos histoires sacrées et notre temps et les offrir en cadeau sur la table de la fraternité. Ainsi, notre fraternité dans le domaine de la mission devient plus significative, car chacun de nous a reçu la mission de notre Congrégation. Ensemble, nous partageons la responsabilité de garder vivant l'esprit dont rêvait notre Fondateur.


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    La Fraternité pour la nouvelle aventure

    La vraie joie dans la vie est de travailler avec « un but reconnu par soi-même et par les autres comme étant grand » (P.G Bernard Shaw). Si nous sommes d'accord que c'est vrai, nous devons être joyeux. Pourquoi? Précisément parce que nous reconnaissons notre but comme l'instrument de la mission de Dieu. Ce faisant, nous marchons déjà, en tant que religieux, sur le chemin de la perfection. En effet, en tant que personnes religieuses, nous sommes censés être le signe de l'amour parfait de Dieu. Et cela ne peut se faire que grâce au soutien de nos frères.

    Le Pape François nous dit : J’attends que « vous réveilliez le monde », parce que la note qui caractérise la vie consacrée est la prophétie. Comme je l’ai dit aux Supérieurs Généraux « la radicalité évangélique ne revient pas seulement aux religieux : elle est demandée à tous. Mais les religieux suivent le Seigneur d’une manière spéciale, de manière prophétique ». Voilà la priorité qui est à présent réclamée : « être des prophètes qui témoignent comment Jésus a vécu sur cette terre…Jamais un religieux ne doit renoncer à la prophétie » (Lettre apostolique du Pape François à toutes les personnes consacrées, II, 2)

    En effet, la vie religieuse et missionnaire est une aventure. L'aventure donnera sens à nos propres histoires de vie, à nos échecs et à notre fragilité ; Une aventure sur le chemin de la sainteté.   §