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    Des Régions et Provinces

    Ne pas attendre demain pour pardonner

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    Yengo Germain

    Yengo Germain, cicm
    Missionnaire en Belgique

     

    L'urgence de la réconciliation est de vivre en paix aujourd'hui avant de reposer en paix demain.

    La vie, dit-on, « est un voyage vers l’inconnu », marqué par des rencontres, des joies, des peines des conflits. Chaque jour, nous avançons sans connaître le moment où notre pèlerinage terrestre prendra fin. Le Christ nous rappelle avec sagesse : « Veillez donc, puisque vous ne savez ni le jour ni l’heure » (Matthieu 25,13). Cette vérité biblique nous invite à vivre chaque instant avec une conscience éveillée, à chercher la réconciliation et à cultiver la paix dans nos cœurs et nos communautés.

    Pendant mes trois ans de mission pastorale dans le Diocèse d'Inongo, j'ai eu à travailler ardemment, entre autres, pour favoriser la réconciliation entre membres de différentes familles biologiques ou apparentées, obédiences sociopolitiques, associations idéologiques et même entre membres de différentes communautés sacerdotales et religieuses. Ces familles, ces regroupements et ces communautés, bien que partageant une foi commune, étaient parfois divisées par des malentendus et des conflits culturels. J'ai souvent été témoin de tensions entre différents membres, et l'urgence de la réconciliation et du pardon restait cruciale. Les relations interpersonnelles n’étaient pas stables, parce que marquée par des divisions profondes entre les membres de plusieurs familles, communauté ou associations, souvent à cause de soupçons de sorcellerie, de procès d'intention, de clichés et de médisances. Ces situations rendaient encore plus pressante la reconnaissance de l'urgence de la réconciliation. Étant témoin de ces expériences qui ont même parfois fait des victimes, j’ai compris une chose : nous croyons que le temps est infini, que nous aurons toujours un lendemain pour résoudre nos différends. Mais cette illusion nous détourne de l'essentiel. Le pardon et la réconciliation sont des actes que nous devons accomplir aujourd'hui, avant qu'il ne soit trop tard.


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    Dans la sagesse infinie de notre Seigneur, il nous a été donné de vivre chaque jour sans connaître l'heure de notre départ de ce monde. Et, si le Seigneur n’a pas révélé ce moment, c’est parce qu’il préfère nous voir « toujours prêts » à comparaitre devant Lui. Cette incertitude nous invite à être prêts en tout temps, particulièrement dans notre relation avec nos proches et avec Dieu. Il est facile de croire que nous aurons toujours le temps de régler nos différends, de pardonner et de nous réconcilier. Pourtant, cette illusion de temps infini est une ruse du malin, du diable. Celui-ci veut inciter des frères et sœurs à ne pas faire du pardon et de la réconciliation une urgence à temps plein. Mais nous devons savoir que chaque conflit incrusté dans notre cœur est un obstacle à la paix et à la libération que le Christ nous offre. Le pardon et la réconciliation ne sont pas des actes à différer, car ils sont essentiels pour notre salut, et notre bien-être à la fois physique et spirituel. Peut-on s’offrir un bon sommeil quand on sait que ça ne va pas avec l’autre ? Peut-on bien prier et offrir aisément le sacrifice qui nous réconcilie avec Dieu lorsque nous savons que, en âme et conscience, nous avons tissé un conflit verrouillé avec un tel ? J’interroge ma conscience.

    En tant que missionnaire dans le Diocèse d’Inongo, j'ai vu combien la réconciliation peut libérer les cœurs et transformer les communautés. J'ai été témoin de membres de communautés qui, après des années de rancune, ont retrouvé la paix en suivant l'exemple du Christ qui pardonne à tout moment. Plusieurs fois, j, ai dû me mettre à genoux pendant un bon moment pour arracher le pardon d’une partie en faveur de l’autre et pour finalement terminer par une célébration d’action de grâce.


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    Faire le premier pas pour aller aux urgences du pardon, même lorsque nous croyons avoir raison, est un signe à la fois d’humilité, de force, de maturité et de foi. En agissant ainsi, nous suivons l'exemple du Christ, qui a toujours prôné le pardon et l'amour inconditionnels. Nous savons qu’il est parfois difficile de prendre l'initiative de la réconciliation, surtout lorsque nous nous sentons négligés, abaissés, ignorés, blessés ou trahis. Cependant, en faisant ce pas, nous témoignons de notre engagement envers la paix et l'amour divin qui sont essentiels pour une vie harmonieuse dans une communauté, une famille, une association.

    Nous devons nous rappeler que le pardon est un chemin de guérison pour nous-mêmes et pour ceux avec qui nous cherchons à nous réconcilier. Tant que nous vivons en société et sommes différents les uns des autres, il n’est pas facile d'éviter certains comportements qui alimentent les conflits. Dramatiser les situations et sous-estimer un frère, une sœur ou un ami ne font qu'ajouter de l'huile sur le feu. Prêter de mauvaises intentions à l’autre sans preuve est une injustice. Comptabiliser les offenses passées, en gardant le compte de chaque faute, est un poison pour l'âme. Le Christ nous a appris et nous appelle encore et encore à pardonner « non pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à soixante-dix fois sept fois » (Matthieu 18,22).

    Dans notre action pastorale, nous avons mis en place des pratiques spirituelles pour favoriser la réconciliation, comme les prières communautaires (paroisse et certaines familles) et les rencontres de médiation. Dans notre prière, nous demandons à Dieu de nous aider à voir ce que nous devons abandonner et laisser derrière soi, comme par exemple les comportements et les habitudes qui créent des divisions et des conflits, pour favoriser un environnement de paix et de compréhension mutuelle. C’est là que l’investissement humain pour un paradis communautaire et familial se fait pressant.


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    Il est connu de tous que la démarche pour la réconciliation est difficile. Mais cette démarche est essentielle. Savoir demander pardon, même par l’entremise d’intermédiaires, est une marque d'humilité. Savoir pardonner et refaire route ensemble est un acte de foi en l'amour divin. Comme nous le rappelle l'Apôtre Pierre : « Par-dessus tout, ayez un ardent amour les uns pour les autres, car l'amour couvre une multitude de péchés » (1 Pierre 4,8).

    Dans notre quotidien missionnaire, nous sommes souvent confrontés à des conflits et des malentendus. Il est facile de laisser ces désaccords s'envenimer, croyant que nous aurons toujours une occasion pour les résoudre. Cependant, l'incertitude de notre existence nous rappelle que le moment de la réconciliation est « maintenant » ; car chaque instant est une opportunité pour faire la paix et restaurer les liens brisés. Ainsi, on peut chercher à vivre en paix aujourd’hui pour reposer en paix demain, car le Seigneur nous « pardonne nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ».