Par Bernard Kayimbw Mbay, cicm
« Amour et Vérité se rencontrent, Justice et Paix s’embrassent » (Ps 85:11). Ces mots du psalmiste prennent tout leur poids lorsque nous réalisons la relation la plus profonde qui existe entre la justice, la paix et l’intégrité de la création. Du 2 au 6 décembre 2019, sept confrères venant des Provinces CICM d’ACO, ASI, BNL, LAC, RP et US ont participé à un atelier de formation pour les promoteurs de Justice, Paix et Intégrité de la Création (JPIC) organisé par l’Union Internationale des Supérieurs Généraux à Rome en Italie. Le but de la formation était, dans un premier lieu, de nous fournir des informations de base concernant les services et opportunités disponibles pour les promoteurs de la JPIC.
Ensuite, nous avons été guidés à élaborer de stratégies, plans et activités pour faire face aux problèmes mondiaux de la JPIC. À cette fin, en plus d’apprendre la définition, la structure, les groupes de travail et les responsabilités de base de la JPIC, nous avons également été exposés à de nombreux problèmes affectant notre famille humaine tels que la pauvreté, le trafic des êtres humains, l’exploitation d’immigrants vulnérables, l’exploitation des enfants et les abus dans le secteur minier, les réfugiés, le changement climatique ou la vulnérabilité de notre écosystème, etc. Et pendant que nous discutions de ces questions, nous étions conscients de ne pas nous attarder autant sur les symptômes que sur les causes qui mettent notre planète, les individus et les communautés entières dans des situations aussi vulnérables et déplorables. La soif d’argent et l’obsession de Controller ou soumettre le monde reflétées dans de nombreux systèmes économiques et ce que le Pape François a appelé la « culture de l’indifférence » ou « l’anesthésie du cœur » sont sans doute la cause de ce déraillement.
La parabole du nouveau vin dans les outres neuves (Mc 2 : 21-22) s’est avérée être la spiritualité parfaite pour nous les religieux promoteurs de JPIC. Notre consécration même et notre appel à la sainteté nous poussent à défendre la plénitude de vie que Jésus offre à toute la Création. Le nouveau et bon vin, c’est l’enseignement et la plénitude de vie de Jésus qui doivent être versés dans des outres neuves qui sont notre identité et notre passion renouvelées. C’est nous qui devons être renouvelés, rajeunis et rafraîchis afin de contenir et de donner à la famille humaine et à la création un nouveau et bon vin.
Lorsque nous nous préoccupons de notre planète, de notre gémissante « maison commune », lorsque nous nous préoccupons pour les pauvres, les vulnérables, les opprimés, les exploités et les victimes de systèmes et de structures injustes, en réalité nous ne pratiquons pas à juste titre un acte de charité. Chaque fois que nous entendons le cri de la terre et le cri des pauvres, nous nous rappelons que nous sommes les gardiens de la création de Dieu (Gn 1:26) et les gardiens les uns des autres (Gn 4 : 9), ce qui implique responsabilité et compte rendu. Nous sommes invités à donner une réponse prophétique au nom des communautés affectées et de notre planète qui est en train d’être détruite de manière irresponsable. Nous sommes la conscience de notre société, comme l’a démontré très clairement le Pape François avec sa forte passion pour la défense de notre planète et des pauvres.
Enfin, l’atelier nous a permis d’établir des réseaux avec divers groupes et organisations travaillant dans les situations liées à JPIC. JPIC est un vaste domaine, et personne ne peut s’attaquer à tous ses problèmes dans toute la mesure en faisant cavalier seul. Nous avons entendu l’expression « travailler intelligemment vaut mieux que travailler dur ». Les réseaux sont l’un des meilleurs moyens de travailler plus intelligemment, étant donné que nous nous complétons et maximisons nos actions ensemble. Car d’une manière ou d’une autre, tous les problèmes dont s’occupe la JPIC sont interconnectés.
Travailler avec des groupes externes est bénéfique à bien des égards, y compris l’efficacité et la réduction des structures et des dépenses. Des groupes comme Talitha Kum — un réseau de relations internationales de la vie consacrée contre le trafic des êtres humains, Solidarité avec le Soudan du Sud, le Catholic Global Climate Movement, SEDOS, Africa Europe Faith and Justice Network, Integrity of Creation working group, JPIC Africa, etc. ne sont que quelques exemples parmi de nombreuses organisations qui travaillent déjà dans des domaines spécifiques de la JPIC avec lesquels nous pouvons travailler en partenariat.
Notre atelier de formation a également été enrichi par diverses personnes expérimentées parmi lesquelles il y avait ceux qui ont participé au synode panamazonien, ceux qui ont travaillé dans la structure des Nations Unies et un représentant du Dicastère pour la promotion du développement humain intégral. S’appuyant sur leurs expériences personnelles et leur familiarité avec différents programmes et ressources, ils ont donné une perspective très unique sur le monde tel qu’il est en comparaison avec le monde tel qu’il devrait être. L’enseignement social de l’Église, les objectifs de développements durables des Nations Unies, la charte de la terre et la Déclaration des droits de l’homme sont des ressources que les promoteurs de JPIC devraient utiliser pour répondre aux situations respectives où qu’ils se trouvent.
Le physicien allemand Albert Einstein a dit une fois : « vous ne pouvez pas résoudre un problème à partir de la même conscience qui l’a créé ». Attendre des gouvernements politiques et des sociétés commerciales multinationales de se soucier des pauvres et de notre planète ne fera que nous plonger dans le désespoir et l’incertitude. Et d’ailleurs, les efforts et les actions menés par les activistes pour changer le monde afin d’en faire un meilleur endroit pour tous et pour la nature ont toujours rencontré des résistances, des reculs et même des attaques, car ils sont nombreux ceux qui profitent de la misère humaine.
Par contre, le monde est en train d’être inspiré par de jeunes voix comme la jeune suédoise de 16 ans, Greta Thunberg Eleonora Ernman, une militante et défenseuse de l’environnement climatique. Elle est l’expression de la nécessité de trouver de nouvelles façons de faire face à la résistance et au sabotage de certains leaders du monde.
Comme nous réfléchissions sur cette réalité mixte, nous tous, participants dans cette formation, avons convenu que la JPIC devait faire partie de notre formation à tous les niveaux : Prénoviciat, noviciat, philosophie, théologie, stage et formation permanente. Un panéliste a observé que nos programmes de formation enseignent aux futurs prêtres comment écrire de belles homélies, mais échouent lamentablement à fournir une formation solide et critique sur la JPIC, en particulier en ce qui concerne les problèmes réels, douloureux et souvent complexes que les personnes que nous servons font face quotidiennement. Pour établir le règne du Christ et créer un monde meilleur, non seulement devons-nous être la voix des sans-voix et la conscience de notre société, mais surtout, nous devons être les instruments d’un développement humain intégral. La JPIC doit faire partie intégrante de toute notre mission, notre charisme, notre projet missionnaire, notre ministère et notre mode de vie, et non pas une tâche secondaire. Si nous sommes vraiment sérieux à ce sujet, alors, en tant que Provinces CICM, nous devrions volontairement, nommer un confrère à temps plein pour coordonner notre engagement dans la JPIC.
Nous invitons tous les confrères à lire nos articles à propos de JPIC dans les numéros de Chronica et à visiter le site web JPIC qui est en cours de lancement pour créer un réseau entre les confrères.
Nous tenons à remercier le Vicaire général Adorable Castillo, coordinateur du bureau JPIC et le Gouvernement général pour l’invitation. Nous remercions également la communauté du Collegio Missionario CICM pour son hospitalité pendant notre séjour dans la Ville Éternelle.