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    CICM-Mongolie : 30 ans de présence (1992-2022), Appelés à être témoins

    In the frontlinePar Simon Mputu, cicm

     

    L’année 2022 marque le 30e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et le gouvernement de la Mongolie. Mais bien plus important encore, pour les fidèles mongols, elle marque le 30e anniversaire de la présence de l’Église catholique dans ce pays. Oui, il y a 30 ans, trois missionnaires courageux se sont lancés dans une aventure pour partager le message du salut au peuple mongol. Nous avons la chance d’avoir encore deux de ces vaillants confrères avec nous : le Père Robert Goessens au Japon et le Père Gilbert Sales aux Philippines. Mgr Wenceslao Padilla (Wens), notre cher évêque, nous a déjà précédés auprès du Père.

    Ce temps de célébration est sans aucun doute l’occasion de remercier Dieu pour les innombrables bénédictions accordées au peuple mongol au cours de ces 30 dernières années. Nous avons en effet la chance de faire partie de cet incroyable cheminement dans les Steppes, sur les pas de notre cher Fondateur, le Père Théophile Verbist, en tant que serviteurs dans cette vigne du Seigneur.

    En effet, l’histoire des relations entre CICM et les Mongols n’a pas commencé après la Révolution démocratique ! Au début de notre Institut Missionnaire, CICM et le peuple mongol avaient déjà noué des liens. Les Mongols ont été parmi les premières personnes que CICM a servies dans le monde. Peu après son arrivée en Mongolie intérieure, en Chine, notre Fondateur avait insisté pour que certains CICM apprennent la langue mongole pour faire leur apostolat parmi les Mongols. Le Fondateur était déjà conscient que travailler parmi les Mongols ne serait pas facile. Il savait déjà que les Mongols n’étaient pas aussi ouverts et accueillants au message de l’Évangile que les Chinois. Cependant, cela n’a pas éteint en lui et ses compagnons le désir et la détermination d’apporter l’Évangile aux Mongols, car ils avaient foi en Dieu, le Maître de la mission. De là, nous pouvons comprendre que Verbist et les premiers confrères ne s’intéressaient pas à savoir s’ils seraient accueillis avec des fleurs ou si leur message trouverait un terrain favorable ou non. C’était plutôt leur amour pour la mission qui comptait. Dans une de ses lettres aux novices, il déclarait : « Pour celui qui aime, rien n’est difficile. » Cet amour les a conduits à embrasser la mission auprès des Mongols, malgré l’indifférence apparente et les conditions climatiques difficiles. On raconte que lorsque la CICM a été chassée de Chine (Mongolie intérieure), il y avait environ 2000 catholiques parmi les Mongols. Aujourd’hui, alors que l’Église célèbre 30 ans de cheminement avec le peuple mongol, il y a approximativement 1300 catholiques ici en Mongolie « extérieure ». Cela a donc un air du déjà vu.

    Les temps ont changé, mais la mission est restée la même et la mentalité mongole ne semble avoir que très peu changé. Bien sûr, aujourd’hui, nous nous vantons des prouesses de la technologie moderne, qui nous permet d’être en contact avec nos proches. Bien que le climat soit resté le même, nous nous réjouissons d’avoir de meilleurs vêtements pour lutter contre le froid. Nous avons des humidificateurs et des purificateurs d’air pour garantir un air plus sain dans nos salons et nos églises. Mais nous sommes toujours confrontés à la même indifférence à l’égard de l’Évangile que Verbist et ses compagnons avaient affronté il y a plus d’un siècle. Nous sommes toujours confrontés aux mêmes difficultés que celles rencontrées par Mgr Wens, les Pères Robert et Gilbert il y a 30 ans. La seule différence serait peut-être qu’ils étaient motivés par ces défis et ces problèmes alors que nous en sommes effrayés ! Les flux et reflux qu’ils ont rencontrés les ont poussés à faire encore plus confiance à Dieu, alors que nous avons tendance à nous appuyer davantage sur nos capacités pour faire fonctionner les choses. Parfois, nous aimons nous présenter comme des réparateurs. Mais ensuite, lorsque nous nous rendons compte que nous ne pouvons rien réparer, nous nous décourageons et finissons par construire des « petits royaumes » autour de nous avec des personnes qui dansent sur le même pied que nous. Ou bien nous commençons à nous accuser les uns les autres pour nous assurer que quelqu’un porte le blâme.

    En effet, beaucoup d’entre nous, pas seulement les CICM, mais les membres d’autres congrégations travaillant en Mongolie, expriment leur frustration face à la lenteur de la croissance de l’Église en Mongolie. Je me souviens comment le prêtre coréen Fidei Donum, actuellement recteur de la cathédrale Saints Pierre et Paul, a exprimé cette frustration pendant la messe lors de notre récollection de l’Avent l’année dernière : « Nous allons célébrer le 30e anniversaire de l’Église en Mongolie. Mais nos églises sont vides. Alors, qu’allons-nous célébrer ? », se lamentait-il. Il fait partie des vétérans ici. Si un vétéran est frustré de la sorte, que dire d’un nouveau venu !

    Si nous examinons les chiffres, nous ne trouverons peut-être aucune raison de nous réjouir. De plus, le rythme auquel les autres églises chrétiennes, principalement les protestants, se développent peut nous gêner, ne serait-ce que pour dire aux autres que nous sommes ici depuis 30 ans. Une fois, je discutais avec un fidèle mormon mongol, et j’ai été surpris d’apprendre qu’ils ont plus de 20 missionnaires mongols dans d’autres pays, en plus des 62 autres qui travaillent sur place. En décembre 2021, leur église comptait plus de 11 000 membres. Mais l’Église mormone est arrivée en Mongolie un an après l’arrivée de l’Église catholique.

    Cependant, célébrer un anniversaire comme celui-ci ne concerne pas tellement nos réalisations tangibles. Il s’agit plutôt de célébrer ce que Dieu a fait pour nous et à travers nous. Nous célébrons le fait que, malgré nos faiblesses et parfois nos infidélités, Il nous est resté fidèle et continue à cheminer avec nous. C’est peut-être aussi le moment de nous asseoir et de comprendre que Dieu ne nous a pas envoyés ici parce que les Mongols sont faciles à convaincre. Il ne nous a pas envoyés à la conquête. Nous sommes ici parce qu’Il veut que nous soyons ici. Il désire que nous cheminions ensemble avec nos sœurs et frères mongols, que nous soyons des témoins et non des conquérants ! Une telle attitude nous soutiendra dans les épreuves et nous gardera fidèles à Celui qui nous appelle à cette belle mission dans les Steppes. Nous devrions donc nous préoccuper davantage du type de témoignage que nous rendons plutôt que du nombre de participants à l’église.  



    CICM-US: 75 ans de Service (1946-2021), Hier et Aujourd’hui

    In the frontlinePar Bill Wyndaele, cicm

     

    J’ai fait partie de la vie de cette Province durant 62 de ses 75 ans. J’ai maintenant 86 ans. Je ne suis plus bon avec les noms ou les dates. Au cours de ces années, beaucoup de choses se sont passées. Il y en a eu beaucoup trop pour les mentionner, mais en voici quelques-uns qui méritent d’être soulignés.

    La promotion du développement était la raison première de l’établissement de la mission aux États-Unis en 1946. C’est la raison pour laquelle Ernest Dieltiens a été envoyé de Chine aux États-Unis. Nous ne pouvons que nous émerveiller de la générosité des catholiques américains après 75 ans de travail de développement et de sensibilisation pour la mission. De nombreux bienfaiteurs sont devenus des donateurs fidèles pour nos missions et de véritables amis de CICM. Au début des années 1960, nous avions six confrères chargés de parcourir le pays pour lancer des missions d’appel (Mission appeals). Pendant des semaines, ils étaient sur la route. Depuis, de nombreux confrères d’autres Provinces sont venus aider aux missions d’appel pendant l’été. Pendant de nombreuses années, le magazine Missionhurst a été distribué à des milliers de lecteurs. Ces dernières années, le bureau de développement a privilégié la création d’un site Internet (https://www.missionhurstcicm.org) plutôt que le magazine et les missions d’appel par la poste afin de sensibiliser les bienfaiteurs potentiels et de promouvoir la mission. Nous sommes très fiers de ce que nous avons fait au cours des années au nom des autres Provinces CICM et nous nous engageons à poursuivre ce travail comme un engagement prioritaire de notre Province.

    Le travail pastoral a également été accepté pour rendre les évêques américains plus ouverts à notre travail de sensibilisation à la mission. Lorsque le Gouvernement général avait décidé de commencer une mission aux États-Unis en 1946, le nombre de membres envoyés avait augmenté rapidement. Il était décidé de se concentrer sur la pastorale des Noirs. Quarante-cinq confrères ont été affectés à la mission des États-Unis au cours des trois premières années. Il n’était pas facile de trouver des diocèses disposés à fournir des paroisses pour Noirs à tous ces confrères. Ainsi, beaucoup ont été envoyés au Texas et dans plusieurs paroisses rurales de Virginie et de Louisiane. Le 17 juillet 1949, le Gouvernement général fit de la mission des États-Unis la Province des États-Unis.

    Quand je suis arrivé en 1960, la Province des États-Unis était devenue une grande Province avec 86 confrères, dont la majorité était belge et quelques-uns hollandais. Ils étaient dispersés dans tout le pays. Il y avait des groupes de confrères dans le nord (Detroit, Philadelphie et Virginie du Nord) qui étaient séparés de ceux du sud (Texas et Louisiane).

    Nous avions encore plusieurs confrères travaillant comme pasteurs associés dans des paroisses pour Noirs à Philadelphie et à Detroit au début des années 1960. Cependant, plusieurs d’entre eux ont été appelés à devenir enseignants dans un collège (voir ci-dessous). Our Lady of Sorrows, une communauté mixte de Noirs et de personnes d’origine belge, ne comptait plus qu’un seul confrère en1980. Ce confrère avait pris sa retraite en 1994. Cela a marqué la fin de notre présence et de notre ministère auprès des Noirs à Détroit. À Philadelphie, nous avions John Van de Paer, qui avait été le pasteur associé de George Vermeiren dans une paroisse à prédominance noire, Saint-Charles Borromeo, depuis 1952 et en était devenu le curé en 1981. Il y a travaillé avec succès jusqu’à sa retraite en 1995. Cette date marqua la fin de la pastorale des Noirs dans notre Province. De plus en plus de confrères étaient affectés à la pastorale des Hispaniques. L’Assemblée provinciale de 1980 a choisi de donner priorité à la pastorale des Hispaniques tout en mettant l’accent sur les pauvres. Depuis lors, cette option a été renouvelée à chaque Assemblée provinciale. Jusqu’en 1960, quelques jeunes confrères étaient envoyés d’Europe chaque année, mais dans les années 1960, il y a eu une baisse significative des vocations missionnaires en Belgique. Ainsi, très peu de nouveaux membres ont été affectés à la Province américaine après leurs études. À la fin des années 1980, on craignait de plus en plus que nous ne devenions une Province vieillissante et stagnante. Mais les choses allaient changer. Aujourd’hui, nous sommes 33.

    La formation et l’américanisation

    Très tôt dans l’histoire de notre Province, il a été décidé de recruter des Américains pour notre Congrégation. En 1958, le premier noviciat a été établi. La Province a décidé d’accepter la dotation d’une école secondaire pour garçons (Archbishop Wood High School) dans l’archidiocèse de Philadelphie. Et, elle s’est engagée à fournir jusqu’à 20 confrères pour l’administration et le personnel enseignant. L’école avait ouvert ses portes en 1964. L’espoir était que cette école devienne une source régulière de vocations CICM. Cependant, les années 1960 ont été une période difficile pour les vocations. En réalité, seuls trois ressortissants de cette école ont rejoint la CICM sur une période de quatre ans. En 1970, il était clair qu’il n’était pas approprié pour une Congrégation missionnaire d’investir autant de ses membres dans une école secondaire qui produisait si peu de vocations CICM. C’est ainsi que l’école a été rendue à l’archidiocèse en 1974. Entre 1958 et 1988, nous avons eu 20 noviciats et un total de 160 novices. En 1981, il a été décidé de ramener le noviciat après la philosophie et de commencer plutôt un programme de prénoviciat. Dans les années 1970, il y avait beaucoup de jeunes hommes dans le programme de prénoviciat, mais seulement quelques-uns avaient rejoint le noviciat. La fin des années 1960 et le début des années 1970 ont été des périodes difficiles pour la plupart des programmes de formation aux États-Unis. Même si nous ne pouvons pas qualifier nos programmes de recrutement et de formation de réussite en termes numériques, nos confrères américains (US et Canada) se sont révélés merveilleux dans leurs missions et leur service à la Congrégation. Trois ont été Supérieurs provinciaux de États-Unis, un a été Conseiller général, et un autre a été Conseiller général puis Supérieur général. Nous sommes fiers d’eux et reconnaissants pour leur service.

    Le dernier noviciat a eu lieu à San Antonio de 1985 à 1986, avec un seul novice. Il a été décidé qu’aucun effort supplémentaire ne serait fait pour recruter aux États-Unis. Cependant, un fort désir de reprendre le recrutement s’est manifesté au cours de deux dernières Assemblées provinciales. Nous avons actuellement un prénovice qui suit des cours de philosophie à San Antonio, Texas. Nous prions et espérons plus de vocations à l’avenir.

    Le besoin d’américaniser la Province des États-Unis s’est fait sentir à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Plusieurs confrères américains ont été rappelés de leurs missions à l’étranger pour travailler à l’animation vocationnelle, à la Formation initiale et aux projets de développement (Promotion). De là, ils accédaient progressivement à des postes de direction. Joe Giordano a été le premier confrère d’origine américaine à être nommé Supérieur provincial de 1988 à1994. Bill Quigley a occupé la fonction de Supérieur provincial de 1999 à 2006. Mike Hann, un Canadien d’origine, a été le premier recteur non belge de la Maison provinciale (2003-2012), et Joe Giordano lui a succédé (2012 - 2020).

    L’internationalisation de la Province

    Trois confrères congolais ont été nommés dans notre Province entre 1982 et 1983, mais deux d’entre eux ont été rappelés après quelques années seulement pour des services dans leur Province d’origine. En 1989, 64 des 69 membres de la Province étaient encore d’origine belge ou néerlandaise, vieillissants et donc moins disponibles pour de nouvelles responsabilités. Lorsque le Gouvernement général avait demandé au Gouvernement provincial comment nous voyions l’avenir de la Province de US, notre réponse a été la suivante : « Nous croyons en l’avenir de notre Province de US. Mais… face au processus de vieillissement des membres de notre Province… nous prévoyons le besoin d’avoir 25 jeunes confrères, de préférence de cultures différentes, nommés à notre Province dans les dix prochaines années… »

    Le Gouvernement général a répondu en disant que la Province des États-Unis était précieuse pour le reste de la Congrégation. Dès lors, il y eut un afflux constant de jeunes confrères de la République démocratique du Congo, d’Indonésie et des Philippines. La Province a été rapidement revitalisée et véritablement internationalisée. Plusieurs de ces nouveaux venus ont étudié la théologie à San Antonio, au Texas. Les plus récents ont participé à un programme de stage de trois ans. On leur donne le temps nécessaire pour apprendre l’anglais et l’espagnol et pour commencer le ministère sous une supervision adéquate. Parmi les 33 membres, on compte actuellement 11 Congolais, neuf Philippins, six Américains (cinq US, un Canadien), trois Indonésiens, un Zambien et trois Belges en retraite. Le sentiment général est que nous sommes une Province relativement jeune et internationale.

    Une Participation plus active de tous les membres au Gouvernement de la Province et à La Formation permanente

    Notre Province a commencé à impliquer plus de confrères dans le processus de prise de décision sous l’influence de « Il faut que le feu brûle » (Actes du Chapitre général de 1974). En 1980, une Assemblée provinciale était tenue à Missionhurst. Vingt délégués, sur un total de 83 membres, s’étaient joints au Gouvernement provincial avec droit de vote. Cette Assemblée provinciale avait décidé de prendre au sérieux notre Formation permanente. Un responsable de la Formation permanente a été nommé avec la tâche de publier et de proposer des modèles de programmes sabbatiques. Entre 1981 et 1984, de nombreux confrères ont participé à un programme de renouvellement ou de période sabbatique. En dehors de cela, tous les deux ans, nous avons organisé des journées de Formation permanente auxquelles tous les membres ont participé. L’Église des États-Unis dispose d’un certain nombre de merveilleux programmes de renouvellement spirituel, de guérison et de formation au leadership. Entre 1976 et 1990, nous avons facilité la participation de 69 membres d’autres Provinces CICM à un programme sabbatique aux États-Unis. Nous continuerons à le faire.

    Les Assemblées provinciales se tiennent désormais tous les quatre ans. Chaque fois, nous fixons des objectifs basés sur notre charisme CICM pour les quatre années à venir. Ces Assemblées, ainsi que nos retraites annuelles où tous les membres se réunissent, ont insufflé un nouvel esprit à notre groupe. Nous avons l’occasion d’apprendre à nous connaître, nous prions ensemble, nous prenons des décisions ensemble et nous comprenons maintenant que nous sommes tous responsables de notre Province. Partager ses pensées et ses sentiments était inhabituel avant 1980, car on avait peur de la réaction des autres. Mais, avec le temps, nous avons pris l’habitude de partager nos pensées, nos prières et nos souhaits les plus profonds. À cet égard, l’aide d’animateurs qualifiés pour les Assemblées s’est avérée très bénéfique.

    Je pourrais en dire beaucoup plus, mais mon dernier mot est un mot de gratitude. Nous avons eu des moments plus sombres dans l’histoire de notre Province, mais nous devons nous rappeler de compter nos bénédictions. Le Seigneur nous a bénis. Nous sommes reconnaissants pour les nombreuses bénédictions qui nous sont parvenues. Nous sommes reconnaissants pour l’excellence de leadership favorisé par les Chapitres généraux de notre Institut et les Supérieurs provinciaux. Nous sommes reconnaissants pour tous les hommes qui ont fait partie de notre Province et pour l’espoir que les jeunes membres de la Province nous ont apporté. Selon les mots de Dag Hammarskjold : « Pour tout ce qui a été, Merci. Pour tout ce qui est à venir, Oui ! »  




    Missionnaire aujourd’hui, c’est dépassé ?

    In the frontlinePar Jan Reynebeau, cicm

     

    Interview du Père Jan Reynebeau, Supérieur provincial de BNL qui encourage fortement les trois «jeunes» Scheutistes, venus de l’étranger et installés à Anvers depuis 3 ans et prépare actuellement l’insertion d’une nouvelle communauté de trois autres trentenaires Scheutistes venus de Haïti, Indonésie et République Centre Afrique dans Scheut en Famille, 2e trimestre 2020

     

    Pour convertir?

    Quand nos anciens partaient en Mission dans le temps, c’était pour faire connaître Jésus, construire l’Église et travailler au développement, puisque dans la mentalité de l’époque ils pensaient être supérieurs aux autres par leur savoir-faire, leur culture,…

    Aujourd’hui le monde devenu un grand village, non seulement parce qu’on se déplace facilement, mais surtout parce que les informations, les idées, les valeurs et les coutumes se partagent de plus en plus, ce qui nous oblige à changer et changer ensemble. C’est pour cela qu’il est bénéfique pour tous que certaines valeurs soient véhiculées à travers des petites communautés qui, à la fois, les diffusent, mais aussi qui les assimilent. Ces petites communautés dans le monde sont comme une bouffée d’oxygène : composées de personnes de cultures différentes, elles aèrent les lieux où elles sont implantées tout en évoluant elles-mêmes.

    Et Dieu dans tout ça?

    C’est évidemment l’Évangile qui ouvre ces missionnaires à d’autres cultures, et ils y croisent d’autres manières de rencontrer Dieu, en s’enrichissant de pratiques religieuses différentes. Ils espèrent enrichir également leurs amis par leurs propres pratiques. Ils le feront aussi en suivant l’exemple de Jésus lorsqu’il rencontrait des personnes de son temps. Plus d’une fois, quand il était au Sénégal, Gabi Hénaut s’était entendu dire par des amis musulmans : Gabi Djouf, tu es comme nous, pourquoi ne deviens-tu pas musulman ? Le partage des valeurs et des pratiques religieuses fait partie intégrante de la Mission. Certains aujourd’hui osent affirmer que : Dieu est trop grand pour être enfermé dans une seule religion !

    Ces nouveaux, ils vont boucher les trous?

    Pour remplacer les curés manquants en Belgique ? Absolument pas ! Sauver ou restaurer l’Église : NON. Leur objectif est de collaborer à construire un monde meilleur, le Royaume de Dieu. Ils le feront par le fait de vivre ensemble alors qu’ils sont de cultures et d’origines fort différentes : être témoins dans une Belgique de plus en plus multiculturelle, de ce qu’un « vivre ensemble » est une grande richesse.

    Ils le feront aussi par une attention particulière aux plus abandonnés, celles et ceux qui ne comptent pas ou peu dans notre société : les démunis, les sans- voix, les réfugiés,… Et enfin en prenant des initiatives diverses qui permettront aux personnes de se mettre ensemble, créer la communion, évacuer la peur de l’autre… C’est une possibilité pour eux de rencontrer bien des personnes qui sont, soit éloignées de l’Église, soit totalement indifférentes. Partager avec elles les valeurs communes tout en gardant et/ou enrichissant sa foi personnelle est une vraie tâche missionnaire.

    Ils ne seront pas curés?

    Dans les circonstances actuelles, ils seront intégrés dans une structure existante : une unité pastorale à Malines, ville multiculturelle. Mais comme ils sont trois, la tâche sera probablement moins lourde à porter, ce qui leur permettra de dépasser les frontières de la pastorale habituelle, et de sortir de l’Église, car c’est là que se trouve une bonne partie des personnes qu’ils doivent atteindre.

    On se souvient comment un autre Scheutiste — Paul Hanson — s’était affilié à un groupe colombophile quand il a compris que c’était le hobby de nombreux habitants de sa commune. De plus, ce sera également l’occasion pour la communauté paroissiale de sortir d’elle-même et de rencontrer également d’autres religions.

     

    foto2-30-03-22.jpgLes trois « jeunes » Scheutistes, venus de l’étranger et installés à Anvers depuis 3 ans.
    Ghislain Toussé (Cameroun), Thomas Hendrikus (Indonésie), Fabio Teixeira (Brésil) [de gauche à droite]

     


    La mission difficile à Dongkeng (Chine)

    In the frontlinePar Joseph Jin Xiuzhang, cicm

    Lorsque je travaillais au séminaire diocésain et, plus tard, au Centre de spiritualité comme prédicateur de retraites ou conférencier, j’avais une vision très étroite de la pastorale. Comme je n’avais jamais travaillé en paroisse, j’avais l’habitude de minimiser ce ministère pastoral, que je considérais comme un travail facile par rapport à ce que je faisais au séminaire.

    Je regrette d’avoir gardé longtemps à l’esprit une fausse conception du ministère pastoral, ce qui m’amenait parfois à critiquer les prêtres dont la performance dans le ministère n’était pas bien appréciée par leurs paroissiens.

    Mon incompréhension du ministère pastoral a été remise en question lorsque je me suis engagé dans le travail pastoral avec nos confrères. De fait, l’expérience m’a beaucoup appris. Surtout, après avoir rencontré des difficultés et des défis inattendus, j’ai commencé à me poser des questions.

    Je suis Chinois et j’ai été envoyé en mission en Chine pour ; mais dans mon propre pays, j’ai d’abord rencontré le problème de la limitation de la langue. En fait, le lieu où j’ai été nommé est différent de celui de ma naissance, et je me suis rendu compte que la plupart des habitants ne sont pas capables de parler le mandarin, la langue officielle. Bien sûr, je ne peux pas les blâmer pour cela. J’ai compris que cela est dû à leur formation. Beaucoup de gens dans le district où je travaille ne sont pas très instruits. De plus, ici les gens préfèrent parler leur dialecte local au lieu de la langue officielle (le mandarin). Un jour, une dame est venue en larmes à mon bureau et m’a partagé son histoire avec émotion. Elle se plaignait du comportement violent de son mari. Mais, j’avais de difficultés à comprendre son plaidoyer, car elle parlait avec émotion et dans une langue que je ne comprenais pas bien. Même si je pouvais deviner à partir de son émotion ce qu’elle essayait de dire, j’étais toutefois perdu et limité linguistiquement. Si je maîtrisais bien la langue, je pouvais certainement avoir plus de confiance pour l’aider. En vue de pouvoir l’aider, je lui ai demandé de parler lentement et clairement ; mais elle m’a simplement regardé et a continué à parler. J’étais tellement désolé de ne pas être en mesure de comprendre ce qu’elle disait, et de plus, je me sentais frustré. Je me suis dit que je devais l’écouter avec mon cœur au lieu de mes oreilles. C’était une expérience difficile pour moi, celle de la limitation de la langue.

    Quelques jours après, une autre dame s’approcha de moi et me dit : « Père Joseph, nous ne comprenons pas ce que vous nous prêchez. » C’était une remarque franche et touchante. Cela m’a défié pour apprendre la langue et m’adapter aux réalités locales, en vue de l’efficacité de mon ministère. Par cette expérience personnelle, je peux m’imaginer et comprendre ce que notre Fondateur Théophile Verbist et ses compagnons ont vécu au début de la mission CICM en Chine. Jusqu’aujourd’hui, beaucoup de nos confrères vivent la même expérience à travers le monde. Toutefois, dans mon expérience pastorale en Chine, outre la difficulté de la langue, j’ai fait face à une autre réalité aussi exigeante, celle de la foi catholique. Pour diverses raisons, les chrétiens ne pratiquent pas leur foi comme il se doit, bien qu’ils affirment qu’ils ont été baptisés. En fait, leur pratique religieuse est influencée par les religions traditionnelles chinoises, telles que le taoïsme, le bouddhisme et d’autres sectes religieuses.

    Par exemple, pour éviter la malchance et avoir la bonne chance, de nombreux catholiques consultent le Maître Fengshui qui, généralement, leur donne des instructions concrètes pour résoudre leurs problèmes. Ensuite, ils viennent voir les prêtres catholiques pour appliquer ce que le Maître Fengshui leur a demandé de faire. Ils le font souvent sans prendre conscience du vrai travail d’un prêtre catholique, et aussi de leur propre foi. Cela me semble étrange que les gens mettent leur foi de côté pour suivre leurs croyances traditionnelles quand ils sont dans le besoin.

    Je pense que beaucoup de prêtres ont fourni des efforts pour empêcher cela, mais jusqu’ici ils n’y sont pas encore parvenus. Et je comprends que cela ne peut pas être changé dans un ou deux ans ; car c’est un long processus auquel nous devrions consacrer plus de temps par la formation des jeunes et des générations futures. Nous pouvons mieux favoriser le lien entre la foi et la culture/les traditions, et aider aussi les gens à accepter ou surmonter leurs expériences douloureuses, telles que la maladie, la malchance, les accidents et la mort. En tant que CICM, l’éducation des jeunes est l’une de nos priorités dans le ministère pastoral, car nous espérons apporter une nouvelle compréhension de la foi en Chine. Nous avons commencé l’école du dimanche pour les jeunes, ce qui n’avait jamais été fait dans ce diocèse auparavant. C’est devenu le lieu où nous essayons d’apporter un changement significatif à la croyance et aux pratiques déformées. De plus, nous avons initié dans la paroisse les camps d’été et d’hiver pour les enfants et les jeunes qui veulent participer, et nous encourageons également les autres à se joindre à nous. Je sais que ce n’est pas toujours facile, mais nous espérons que Dieu nous aidera dans ce ministère que je crois important et significatif. Comme l’affirme Saint Paul : « Donc celui qui plante n’est pas important, ni celui qui arrose ; seul importe celui qui donne la croissance : Dieu » (1 Corinthiens 3, 7).

    Honnêtement parlant, l’épreuve la plus difficile vient de l’environnement politique. Même s’il est écrit dans la Constitution que tout citoyen jouit de la liberté de religion, le gouvernement chinois considère toujours les religions comme une menace pour le régime communiste, en particulier, la foi chrétienne. De fait, le gouvernement central donne des ordres et des règlements qui interdisent aux enfants de fréquenter des lieux de culte et de participer aux activités religieuses. Pour eux, c’est une guerre idéologique entre la foi et le pouvoir et les intérêts du gouvernement communiste chinois.

    Récemment, un bureau religieux local a donné l’ordre de fermer le Centre Tian’ai pour enfants, là où nous nous occupons des enfants, parce qu’il se trouve juste à côté de la maison de prière (l’église). En fait, le gouvernement local craint que les enfants soient influencés par la foi chrétienne. De plus, le directeur de l’école primaire où les enfants étudient menaçait de mettre dehors toute personne qui traînerait au centre. En même temps, certains enseignants continuent de dire aux étudiants que le catholicisme est une hérésie, une organisation malveillante, un opium spirituel et superstitieux.

    Nous ne pouvons rien faire, sinon nous défendre verbalement contre ces fausses accusations et raffermir notre foi selon laquelle Dieu est de notre côté, pour le bien des enfants et de la société en général. C’est cela la situation actuelle en Chine. Face à ces difficultés et défis, nous devons trouver un autre moyen d’accomplir notre mission, car, nous, missionnaires CICM, nous ne cesserons pas de prêcher et de semer le grain de la foi, comme l’a fait notre Fondateur Théophile Verbist. Nous avons récemment commémoré le 150e anniversaire de sa mort, et ses mots résonnent toujours à nos oreilles : « Pour ceux qui aiment, rien n’est impossible. » Nous comptons donc sur vos prières et votre soutien pour continuer la mission CICM en Chine, et promouvoir le bien-être des enfants que nous servons. (ASIA News Bulletin n° 33, mai-juin 2018, pp.2-4). ■