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     CICM répond à un nouvel appel missionnaire au Canada

    Celso Tabalanza

    P. Celso Tabalanza, cicm
    Missionnaire aux USA

     

    Le 16ème Chapitre général déclare ce qui suit : « Suivant les traces de Père Théophile Verbist, notre Fondateur, et de nos précurseurs, le Chapitre général, conscient de la nature missionnaire de notre Congrégation, encourage tous les confrères et entités à répondre à de nouveaux appels missionnaires dans notre monde, tant dans nos Provinces que dans d'autres pays. »

    En 2024, la Congrégation a répondu à l'invitation de l'évêque Claude Lamoureux du diocèse de Gaspé, au Québec, à envoyer des missionnaires CICM au Canada.

    L'histoire du diocèse de Gaspé, Québec, Canada

    La ville de Gaspé est considérée comme le berceau du Canada. Il se trouve à la pointe de la péninsule gaspésienne. C'est le village où l'explorateur Jacques Cartier a planté une croix au nom du roi de France, François Ier, en 1534, ce qui a finalement conduit à la colonisation de la Nouvelle-France. L'hypothèse la plus courante est que le mot « Gaspé » pourrait provenir du mot en langue mi'kmaq Gespeg, qui signifie « la fin de la terre ».

     

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    La photo montre une croix installée en 1934, commandée par le gouvernement du Canada,
    pour commémorer le 400ème anniversaire de l'arrivée des explorateurs français au Canada.
    La croix originelle de Gaspé a été érigée le 24 juillet 1534.

     

    Le diocèse de Gaspé a été érigé par le pape Pie XI le 5 mai 1922 et est suffragant de l'archidiocèse de Rimouski au Québec, au Canada. En incluant les Îles-de-la-Madeleine, le diocèse s'étend sur 20.637 km2. Son territoire comprend les paroisses de la péninsule gaspésienne, aussi appelée Gaspésie, de Cap-Chat au nord jusqu'à Restigouche au sud ainsi que les paroisses des Îles-de-la-Madeleine.

    Jacques Cartier a voulu marquer officiellement la présence française en Amérique lorsqu'il a planté la croix. Sur la croix de dix mètres, il y fit graver les mots « Vive le roi de France ». En 1604, des colons français des régions du sud-ouest et du sud-est de la France ont établi la première colonie française dans certaines parties de la région nord-est de l'Amérique du Nord, appelée Acadie, suivie de la fondation du Québec en 1608. Les registres de l'Église montrent qu'en mai 1659, Mgr François de Laval, déclaré saint par le pape François en 2014, a visité Percé et confirmé quelque 140 jeunes et adultes, amérindiens et d'origine européenne. Cette visite a encouragé les missionnaires à établir plusieurs stations missionnaires, ce qui les a amenés à visiter les Amérindiens et les colons Français.

    En 1860, Mgr Charles-François Baillargeon, administrateur du diocèse de Québec, répond à une demande de missionnaires et érige les premières paroisses en Gaspésie. C'est ainsi que l'Église s'établit en Gaspésie, ce qui contribue à son essor dans la péninsule.

    Statistiques du diocèse de Gaspé

    Le diocèse a une superficie géographique de 20.237 km2. Lors du recensement canadien de 2021, la péninsule gaspésienne comptait une population de 89.342 habitants. Les registres de l'église indiquaient une population catholique de 74.785 personnes. Le diocèse compte trente-neuf prêtres diocésains actifs, dont beaucoup ont atteint l'âge de la retraite, et quatorze sont des Fidei Donum du Bénin. Quarante et un prêtres desservent soixante-trois paroisses, principalement le long du littoral de la baie de Gaspé et du golfe du Saint-Laurent. Le diocèse dessert également deux missions indiennes mi'kmaq. En outre, 80 religieuses du diocèse assument différents ministères : la plupart sont impliquées dans le ministère hospitalier. Les moyens de subsistance de la population sont la pêche, le transport maritime, le tourisme et l'énergie éolienne.


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    Quelques défis missionnaires dans le diocèse

    Le diocèse est divisé en onze secteurs pastoraux géographiques ; dans certains diocèses, on les appelle doyennés. Avec seulement trente-neuf prêtres en activité, un grand pourcentage proche de l'âge de la retraite et quatorze sont incardinés dans d'autres diocèses (Fidei Donum), cela devient un énorme défi pour le diocèse. Par conséquent, certains curés ont la charge pastorale de deux à trois paroisses. Mgr Lamoureux nous a parlé du besoin de poursuivre le développement des églises et des communautés locales. Avec un clergé local vieillissant et un nombre croissant de paroissiens vieillissants (32% de la population a plus de 65 ans), et les distances géographiques des paroisses, la présence missionnaire CICM pourrait revigorer et revitaliser l'œuvre d'évangélisation du diocèse.

    Contrairement à certaines zones de mission CICM, le diocèse est doté de nombreuses églises bien construites, grâce aux efforts des missionnaires de première et deuxième génération. Certaines structures sont bien entretenues, tandis que d'autres ont été abandonnées en raison de problèmes d'ingénierie structurelle. Néanmoins, l'entretien des structures n’est pas ce que nous sommes invités à faire ni d’y représenter une Congrégation Internationales de Constructeurs et Maçons.

    La présence missionnaire CICM est appelée à offrir un esprit missionnaire renouvelé axé sur la nouvelle évangélisation. Le 16ème Chapitre général estime que les nouvelles fondations missionnaires peuvent aussi être comprises comme une nouvelle façon de faire la mission, qui consiste à être plus créatifs dans nos insertions actuelles, en développant de nouvelles formes de présence missionnaire parmi les catégories sociales que nous n'avons pas encore atteintes dans notre travail pastoral. À cet égard, la question d'apporter une « touche CICM » à nos paroisses a été posée : qu'est-ce qui distingue une paroisse CICM d'une paroisse confiée au clergé diocésain ou à tout autre institut religieux ? L'esprit de flexibilité et la mobilité missionnaire sont des attitudes à encourager et à promouvoir parmi les confrères. Chaque gouvernement provincial devrait s'en préoccuper pour une plus grande vitalité et efficacité dans la mission.

     

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    André Kazadi, Mgr Claude Lamoureux et Celso Tabalanza à Gaspé, Canada

     

    Notre présence dans le diocèse de Gaspé pourrait proposer « à nouveau » l'Évangile aux fidèles du diocèse, particulièrement aux jeunes et aux jeunes adultes. On nous a dit que les jeunes adultes quittent habituellement la Gaspésie pour fréquenter les collèges et les universités des grandes villes. Le défi est donc d'offrir aux jeunes et aux jeunes adultes une formation solide afin que, là où ils sont, ils vivent leur foi en Jésus-Christ. Ainsi, notre présence missionnaire pourrait fournir une formation de disciple missionnaire qui inclut la rencontre, l'accompagnement, la communauté et la mission. 

    La Gaspésie est visitée par des milliers de touristes locaux et internationaux chaque année après une longue saison hivernale. Beaucoup d'entre eux vont à la pêche. D'autres apprécient la nature sauvage et le camping avec service complet. Certains font de la randonnée et du trekking en montagne. D'autres apprécient les excursions en mer. La présence CICM pourrait leur offrir de manière créative une sensibilisation et un accompagnement pastoral, à eux et à d'autres personnes « en mouvement », c'est-à-dire ceux qui travaillent dans l'industrie touristique, les parcs nationaux, les centres touristiques, les groupes de pèlerinage, les navires de croisière, les travailleurs migrants et bien d'autres.

    Cette liste est incomplète. La nouvelle équipe missionnaire CICM, en dialogue avec Mgr Claude Lamoureux, pourrait peut-être se concentrer sur un ou deux défis qui ne figurent peut-être pas dans la liste que j'ai citée. Après tout, CICM est au service de l'Église locale. Le Commentaire des Constitutions CICM nous rappelle que « nous ne sommes pas les maîtres de la mission, ni des communautés chrétiennes, ni des Églises, nous en sommes les serviteurs. Nous discernons toujours le type de service dont ils ont besoin. Dans ce discernement, nous dialoguons avec tous ceux qui assument une responsabilité dans les communautés et les Églises particulières ».

    La Gaspésie, nouvelle aventure missionnaire de la Province des États-Unis

    La question que se posaient certains confrères était la suivante : le Canada est-il une nouvelle fondation missionnaire ? Après de profondes réflexions, guidés par l'article 19.7 : « Nouvelles Entreprises Missionnaires » dans le Vade mecum B pour l'Administration Provinciale, qui stipule : « Par Nouvelles Entreprises Missionnaires, nous entendons le début d'une nouvelle expérience missionnaire, généralement dans un pays où CICM n'est pas actuellement à l'œuvre. L'initiative d'une nouvelle aventure missionnaire peut provenir soit du gouvernement général, soit d'une région, soit d'une province, généralement en raison d'une invitation d'une Église particulière ou d'un besoin missionnaire perçu. Il semble préférable de laisser la mise en œuvre de la nouvelle Mission à la province, le gouvernement général et la région jouant un rôle de soutien en termes de personnel et de finances ». En concertation avec le gouvernement général, le gouvernement provincial des États-Unis a décidé que la mise en œuvre de la nouvelle entreprise missionnaire dans le diocèse de Gaspé, Québec, Canada, serait laissée à la province des États-Unis avec le soutien du gouvernement général.

    Cette aventure missionnaire s'inscrit également dans le projet missionnaire de la Province des États-Unis :

    ° Nous affirmons la possibilité de ministères diversifiés en réponse aux besoins des églises locales.

    ° Nous continuerons à sensibiliser les non-baptisés et les non-croyants.

    ° Notre mission consiste à renforcer les laïcs et à en faire des partenaires missionnaires.

    ° L'un de nos projets missionnaires est l'engagement à développer des paroisses missionnaires.

    En gardant cela à l'esprit, je ne serais pas surpris si la province américaine était rebaptisée ou appelée la province des États-Unis et du Canada.

    Je demande à tous de prier l'Esprit Saint, auteur et moteur de la mission, afin que la semence de cette nouvelle entreprise missionnaire CICM puisse tomber dans un sol riche et produire des fruits, à cent, soixante ou trente pour un (Mt 13, 8).    §


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    André Kazadi et Celso Tabalanza concélébrant la messe
    avec Mgr Claude Lamoureux à l'église Saint-Cœur-De-Marie, Chandler, Québec, Canada


    Quinze années en mission au Centre Théophile Verbist (CTV)

    Romain Clement

    Jos Das, cicm
    Missionnaire en RD Congo

     

    Je suis arrivé au CTV début janvier 2009, ensemble avec le Père Herman Coenraets. Le Père Wilner Pierre était directeur et moi, j’avais été nommé comme économe, le Père Herman comme animateur des retraites et récollections. Je n’ai pas eu beaucoup de temps pour ruminer mon petit problème personnel, parce que le Père Wilner m’a proposé immédiatement d’animer une semaine d’initiation au ministère de formateur et formatrice (R-6). J’ai dû travailler dur pour préparer cette semaine. Plongé dans l’eau, je devais nager. Et un peu après, le Père Wilner me proposa d’aller animer deux retraites pour les Sœurs de Marie à Popokabaka. Encore un défi, de nouveau travailler pour préparer cette retraite. L’année suivante, une nouvelle proposition du Père Wilner. Les Sœurs Ursulines de Tildonk qui tenaient leur chapitre provincial à Goma cherchaient un modérateur. Le Père Wilner était là avec sa proposition. J’ai accepté. Je peux donc dire que le Père Wilner m’a lancé. Je lui en suis très reconnaissant. Une autre chose que j’ai fort appréciée. Lors de nos réunions d’équipe, il commençait toujours avec la question : « Comment vous sentez-vous ? Vous sentez-vous à l’aise, contents ? » Cela donnait à chaque membre l’occasion de s’exprimer librement. La personne avant le travail.

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    Deux sessions : R-12 et R-6

    Quand je suis arrivé au CTV, le Centre organisait chaque année deux sessions. La première qui datait déjà de plusieurs années, programmée par le P. David Ngondo, est une session de ressourcement de 12 semaines, appelée R-12. Quelques fois j’y ai animé une semaine sur la mission aujourd’hui. Une deuxième session s’est ajoutée après, intitulée : « Une initiation au ministère de formateur/formatrice », appelée R-6. Au début j’ai animé une semaine de cette session sur le thème de la vie religieuse et la mission. Le jour où le Père Wilner est parti en Afrique du Sud, répondant à un appel du gouvernement général, j’ai repris de lui le thème du leadership dans le ministère de formateur et formatrice.

    Une troisième session s’est ajoutée (V.P.)

    Quelques fois, des supérieures provinciales nous ont demandé une petite session en vue de la préparation aux vœux perpétuels de quelques-unes de leurs consœurs. J’ai répondu positivement à cette demande. Mais comme cette demande se répétait, nous nous sommes demandé si ce n’était pas mieux de programmer une session de 6 semaines. Ensemble avec quelques confrères nous avons élaboré un programme avec des thèmes choisis qui répondent aux attentes des participantes. Pour la première session il n’y avait que 4 inscriptions. On avait l’intention de ne plus la programmer, parce que la deuxième édition n’a pas eu lieu, vu qu’il n’y avait que 2 inscriptions. Mais voilà, l’année suivante, la Congrégation des Sœurs Ursulines de Tildonk (Goma) demandait une telle session pour 6 Sœurs. Suite à cette demande, nous avons lancé des invitations et cette deuxième édition a bénéficié de la participation de 10 religieuses. Depuis cette époque, la session a eu lieu chaque année avec une participation assez nombreuse. Au cours de cette session, que nous appelons V.P. (vœux perpétuels) j’anime une semaine. Ma contribution dans les 3 sessions consiste surtout dans les accompagnements individuels qui ont lieu en soirée.

    Des retraites, des sessions d’une semaine.

    En dehors de ces trois sessions de longue durée, le CTV organise chaque année des retraites d’une semaine, animées pour la plupart par des confrères CICM. Je crois que nous ne pouvons pas nous limiter à mettre notre Centre, cette belle infrastructure, à la disposition des autres ; nous-mêmes CICM nous devons nous engager comme animateurs des retraites et animer aussi quelques thèmes des trois sessions. En 2022 nous avons organisé trois sessions d’une semaine: une session sur le «Leadership», une autre sur «La Communication bienveillante» et une troisième sur «Une initiation au ministère d’accompagnement spirituel». Il n’y a pas mal de religieuses qui désirent faire une retraite individuelle, mais avec un accompagnement. Quand j’ai du temps, j’accepte une telle demande, bien que j’essaie toujours de les orienter vers une retraite en groupe, c’est plus riche. Le CTV est un Centre Spirituel Missionnaire, par conséquent, notre engagement pour soutenir la vie spirituelle des personnes qui s’adressent à nous, doit être une priorité. Cela demande naturellement une grande disponibilité, mais cela vaut la peine.

    Des personnes en difficultés

    Nous vivons des temps mouvementés. L’environnement ne favorise pas toujours la vie religieuse et sacerdotale. Pas mal de religieux, religieuses, prêtres se laissent contaminer par les contre-valeurs de la société, avec toutes les conséquences néfastes pour leur vie religieuse ou sacerdotale. D’autres portent des blessures intérieures profondes, blessés par les circonstances de la vie, à cause parfois d’un mauvais leadership ou d’une vie communautaire peu fraternelle. Suite à cette situation, des évêques et des supérieur(e)s nous demandent si nous pouvons accueillir des confrères ou des consœurs pour un accompagnement d’un mois, de deux mois. Je leur conseille toujours de participer à la session de ressourcement (R-12). Là ils trouveront des animateurs et animatrices compétents, et en plus, ils auront l’occasion de vivre une vie communautaire fraternelle, intercongrégationnelle, interculturelle, mixte, religieux, religieuses, prêtres diocésains, ce qui constitue une grande richesse. En plus un accompagnement personnel est prévu pendant cette session. Mais parfois, il y a urgence, alors j’accepte quand même d’accueillir ces sœurs ou ces frères blessés, car aider une personne en difficulté est une œuvre de miséricorde. Je peux dire que, si les personnes s’ouvrent à la grâce de Dieu, elles repartent d’ici renouvelées et avec un nouvel élan. Être témoin de cette œuvre de Dieu dans les cœurs, est pour moi une grande joie.

    Animateurs-animatrices, programmes

    Chercher et contacter les animateurs des retraites et des sessions et élaborer le programme annuel des activités du CTV est aussi une tâche à accomplir. Comme la plupart des inscrits sont des religieuses, nous avons cherché davantage des Sœurs comme animatrices, tenant compte naturellement de leurs compétences. Et heureusement, elles sont nombreuses les religieuses ici à Kinshasa qui ont reçu une formation solide et qui ont une expérience positive de la vie religieuse.

    Le programme des sessions, surtout celui de la session de ressourcement R-12, est régulièrement renouvelé et adapté aux besoins des temps. Ainsi les exhortations et encycliques du Pape François sont présentées aux participants : La joie de l’Evangile, Laudato si’, Amoris Laetitia, Christus vivit, Fratelli tutti. Ce sont tous des thèmes d’actualité et d’une grande importance pour toute personne. Ces thèmes nous aident aussi à vivre en union avec l’Eglise universelle et ouvrent nos esprits aux grands problèmes du monde et de l’Eglise d’aujourd’hui.

    L’équipe du CTV

    Durant les 15 ans que j’ai vécu et travaillé au CTV, le gouvernement provincial a changé plusieurs fois les membres de l’équipe. Deux Sœurs de la Congrégation des Salésiennes de la Visitation, une comme intendante et l’autre comme responsable de la restauration, forment avec nous l’équipe du CTV. Là aussi, il y a eu des changements, qui ont été chaque fois pour moi un défi à relever. Chaque personne est unique, a ses qualités, son tempérament. Chaque fois, je devais être souple pour m’adapter à cette nouvelle situation. Mais je dois avouer, ces changements se sont bien passés, sans trop de difficultés, parce que chaque personne avait la motivation nécessaire pour s’engager de tout cœur  dans les activités du CTV. De petites réunions d’équipe, une bonne répartition des tâches et le respect de la tâche de chacun et chacune contribuent à une bonne collaboration. Dans le travail en équipe une bonne communication est nécessaire, afin d’éviter les petits problèmes. Les deux Sœurs ont leur communauté de vie, mais nous quatre, nous prenons les repas ensemble. Les confrères et Sœurs qui connaissent notre équipe nous appellent la «communauté mixte». Oui, nous pouvons apprendre les uns des autres en vivant une vie fraternelle, comme des frères et des sœurs.

     

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    J’attendais un successeur

    Depuis plusieurs années j’attendais un confrère pour prendre la relève. Mais le successeur n’arrivait toujours pas. Je crois qu’il faut rajeunir et renouveler ; une nouvelle personne peut venir avec de nouvelles idées. D’un côté, je suis reconnaissant et je remercie le Provincial pour la confiance accordée. Mais de l’autre côté, je crois que personne n’est indispensable ou irremplaçable. Finalement, la bonne nouvelle est tombée: le Père Jean Lugbu est nommé à partir du 1 janvier 2024 directeur du CTV-Mbudi. Moi je continuerai ma vie missionnaire à Menkao, à la paroisse St Eugène, avec un jeune confrère camerounais, le Père Stephen Fuka, comme curé.

    Action de grâce

    Je peux dire que j’ai vécu d’heureuses années au CTV. De nombreuses personnes sont passées ici, les unes pour suivre une session, d’autres pour une retraite, d’autres encore pour un accompagnement personnel. Combien d’heures passées à les écouter ! D’où vient cette confiance qui fait que des gens viennent m’ouvrir la porte de leur cœur, et me partagent leurs joies et leurs peines, leurs combats et leurs inquiétudes, leurs espoirs et leurs rêves ? J’ai été témoin de l’œuvre de Dieu dans le cœur de ceux et celles qui s’ouvrent à lui. C’est Dieu qui touche les cœurs, c’est Dieu qui guérit.

    Tout n’a pas toujours été facile. J’ai mes limites, mes faiblesses, mon impatience. J’ai rencontré de l’incompréhension, j’ai connu des échecs. Parfois, j’ai été découragé. Je me demandais : « Qu’est-ce que je fais ici ? Est-ce que je ne perds pas mon temps ? » Les erreurs n’ont pas manqué dans ma vie. Mais comme le Pape François le dit, les erreurs sont les grands maîtres de notre vie. Par des hauts et des bas, j’ai appris à avancer. Et lui, le Seigneur m’a toujours accompagné, j’ai pu toujours compter sur lui.

    La Pape François dit : « Là où il y a des religieux (religieuses) il y a de la joie ». J’en ai fait l’expérience ici au CTV. La joie, la jeunesse, l’enthousiasme des groupes de religieux et religieuses m’ont réjoui et m’ont aidé à rester enthousiaste et jeune de cœur. J’ai pu participer à de belles liturgies avec des beaux chants. Les psaumes des laudes et les vêpres sont chantés. Tout cela est descendu sur moi comme une grâce. Je ne peux pas oublier les excursions, les pique-niques dans la nature à la paroisse St Eugène à Menkao ou dans le jardin botanique à Kisantu. Des fêtes d’anniversaire chaque mois avec des réjouissances et des danses, bien que moi-même je ne danse pas. Je rends grâce à Dieu, je dis merci à mes supérieurs pour la confiance, à l’équipe du CTV et à toutes les personnes qui sont passées ici et qui m’ont manifesté leur confiance.

    Par ma présence, mon engagement pendant ces 15 années au CTV, j’ai donné quelque chose, j’ai semé, mais c’est le Seigneur qui a donné la croissance. En même temps, je peux dire que j’ai reçu le centuple. Mon ministère ici au CTV m’a invité à rester dynamique, à étudier, à suivre l’actualité. C’est une école de formation permanente. Les rencontres, les accompagnements, les partages avec les intervenants et les participant(e)s m’ont enrichi. Vivre et travailler dans ce Centre spirituel missionnaire m’a aidé à rester en contact avec le Seigneur, à m’enraciner en lui, à orienter continuellement ma vie vers Celui qui m’a appelé à être son disciple-missionnaire, à être prêtre selon son cœur. C’est cela que j’ai essayé et j’essaie chaque jour d’être. Merci Seigneur, pour ta confiance et pour tant d’années de vie que tu m’as accordées et surtout parce que tu m’as gardé dans ton amour. Je suis parmi ces privilégiés dont le psalmiste dit : « Le nombre de nos années: soixante-dix, quatre-vingts pour les plus vigoureux !» (Ps 89,10)


    Scheut et la Première Guerre mondiale

    Romain Clement

    Romain Clement, cicm
    Missionnaire en Belgique

     

    Au début du mois d'août 1914, la Première Guerre mondiale éclate. Grâce aux médias actuels, nous avons la chance de pouvoir suivre, pour ainsi dire, de près les événements qui se sont déroulés il y a un siècle. Dans cet article nous nous limiterons aux conséquences de la guerre pour notre congrégation et plus particulièrement pour nos jeunes belges en formation. En 1914, ces derniers séjournaient principalement dans nos maisons de Scheut-Anderlecht (noviciat et philosophie) et dans la maison de Louvain (théologie et études universitaires).

    Stamford Hill

    Au cours des dernières semaines avant la guerre, une vingtaine de jeunes avaient déjà été enrôlés pour le service militaire. Ils ont été nos premiers « soldats du front ». Dès que la guerre a éclaté en août 2014, les étudiants restants ont été renvoyés provisoirement chez eux, du moins ceux qui étaient encore en mesure de partir. Le Supérieur général Florent Mortier et son Conseil décidèrent alors de se déplacer en territoire non occupé afin de pouvoir rester en meilleur contact avec les différents territoires de mission. Le P. Mortier emporta avec lui les archives de la Congrégation et se rendit, via la Flandre occidentale, à Londres où il trouva refuge dans une maison de retraite inutilisée de sœurs anglaises, le « Cénacle », à Stamford Hill, au nord de la capitale. La maison était assez spacieuse et, dès qu’il le fut possible, le P. Mortier appela à Londres le plus grand nombre possible de novices, de théologiens et de professeurs pour y poursuivre leur formation. Les étudiants de philosophie, quant à eux, se rendirent à Sparrendaal, dans les Pays-Bas neutres.

    Dès le début de la guerre, les maisons de Scheut et de Louvain sont transformées en hôpitaux d'urgence pour la Croix-Rouge et officiellement reconnues. La maison de Scheut ne sera jamais utilisée comme telle ; à Louvain, cependant, de nombreux blessés trouveront refuge jusqu'à la fin de la guerre.

     

    « Les bonnes sœurs de cet asile travaillèrent d'arrache-pied pour loger notre communauté. À cette époque, nous n'étions pas moins de 109 : théologiens, novices et étudiants. Nous, étrangers inconnus, avons reçu l'accueil le plus généreux à Stamford Hill. À tel point que, sur une terre étrangère, le Cénacle est devenu comme la Maison-Mère de notre Congrégation. C'est là qu'a été solennellement célébré notre jubilé, c'est là qu'ont eu lieu les touchantes ordinations de nos prêtres, c'est là qu'a eu lieu le départ émouvant de nos missionnaires, c'est là que nos confrères, qui sont revenus fatigués et épuisés des pays étrangers, ont trouvé un abri accueillant, des soins maternels et la possibilité de se refaire des forces. 

    (Témoignage d'un confrère de Stamford Hill, publié dans « Missions de Scheut », 1920)

    Auvours

    Une loi sur la milice de mars 1915 a eu un impact majeur sur nos étudiants. Tous les hommes belges âgés de 18 à 25 ans, qui résidaient en Belgique non occupée, étaient appelés à se mettre à la disposition de l'armée belge. Bien sûr, cela incluait une grande partie de nos étudiants qui séjournaient à Stamford Hill ou à Sparrendaal. Les étudiants religieux et prêtres ont été priés de se rendre le plus rapidement possible à Auvours, juste au nord du Mans en France. Dans les baraquements spacieux, il y avait, entre autres, un service du C.I.B.I. (Centre d'Instruction pour Brancardiers et Infirmiers) et bientôt des dizaines de jeunes Scheutistes s'y installèrent. Leur préparation pour le front pouvait commencer. Quelques étudiants belges en théologie ‘déclarés impropres au service’ allèrent avec les Hollandais à « Huize Gerra » près de Sparrendaal et y ont poursuivi leurs études.

    À Auvours, les « cibistes » furent bien préparés à la tâche qui les attendait. La vie du camp consistait en des exercices militaires et une formation par la Croix-Rouge : marches, cours théoriques sur l'organisation de l'armée belge, cours pratiques. La préparation morale et spirituelle à la vie au front a également été proposée. Cela ne se produisait généralement que le matin. Dans l'après-midi, il y avait du temps pour l'étude personnelle, la prière et la détente.


    Fatines

    Très vite, le Supérieur général vint rejoindre ses confrères en France. Grâce aux efforts de l'évêque du lieu, il put disposer du spacieux presbytère de Fatines, un village près d'Auvours. De là, il desservit quatre paroisses qui n'avaient pas de pasteur et resta également en contact avec les « cibistes » de Scheut. Bientôt, cependant, il retourna à Londres pour continuer à diriger la congrégation à partir de là. Il fut remplacé par le P. Albert Gueluy, son premier assistant, qui devint temporairement le supérieur des « étudiants sous les armes », y compris ceux qui travaillaient déjà au front ou dans les hôpitaux militaires. Ces derniers entretenaient une correspondance régulière avec le P. Gueluy. À ce jour, les lettres qui nous sont parvenues sont une source très riche d'informations sur cette période.

    Tous les soirs, les confrères d'Auvours pouvaient, s'ils le voulaient, se rendre au presbytère de Fatines pour se reposer et dîner. À partir de mai 1916, ils purent même obtenir l'autorisation de passer un dimanche entier à Fatines. Cependant, tout cela ne dura pas très longtemps car à l'été de la même année les premiers cibistes quittèrent Auvours et furent déployés sur le front. À la fin de 1916, tous avaient quitté le camp, bien que pendant toute la guerre, il y eut toujours une certaine présence de Scheutistes, e.a. ceux qui avaient été blessés au front et qui avaient besoin de soins.

    Il convient de mentionner que Scheut a également connu des épreuves à Auvours. Le 18 septembre 1915, l'étudiant en théologie Karel De Croo meurt d'une inflammation intestinale à l'hôpital voisin d'Yvré-l'Évêque. La cérémonie des funérailles fut présidée par l'aumônier du camp, le P. Karel Servranckx, sj. Et peu après, le 13 octobre 1915, Maurice Sérulier, qui allait célébrer la messe tous les jours à Yvré-l'Évêque, fut surpris par un train alors qu'il traversait une voie ferrée. Il venait d’être ordonné prêtre le 29 juin de la même année. C'est le Supérieur général Florent Mortier lui-même qui est venu de Londres pour présider les funérailles.

    À l'été 1916, lorsque les premiers cibistes arrivèrent d'Auvours, la ligne de front, du moins en ce qui concerne la Belgique, était plus ou moins stabilisée sur une longueur de 84 km grâce à une série de tranchées qui s'étendaient de Nieuport à Ploegsteert. À l'ouest de cette ligne se trouvaient les armées alliées, à l'est les armées centrales. 


    La vie au front

    Environ 120 Scheutistes furent déployés dans les armées alliées comme brancardiers-infirmiers et une douzaine comme aumôniers. Six postulants (candidats Scheutistes) étaient de simples soldats. Les missionnaires proprement dits (dans les territoires de mission, ou en congé, ou prêts à partir) n'ont pas été appelés par le gouvernement belge. Une grande partie des Scheutistes engagés dans l'armée étaient déployés sur le front lui-même, d'autres travaillaient comme infirmiers dans des hôpitaux militaires à l'arrière du front. Nous connaissons tous l'image classique des brancardiers : des personnes qui se risquent sur les lignes du front avec une civière pour transporter les morts ou les blessés. Les morts étaient enterrés provisoirement, les blessés étaient emmenés dans un hôpital de campagne ou plus loin derrière le front. Cela a dû être un travail extrêmement difficile et risqué. Pourtant, nos Scheutistes (ainsi que tant d'autres religieux et séminaristes) l'ont fait pendant deux à trois ans en fonction de leur arrivée au front.

    Mais les brancardiers, qui avaient déjà reçu une certaine formation religieuse, étaient invités à faire plus que d'emmener les blessés et de leur administrer les soins de base. Le soutien spirituel faisait également partie de leurs devoirs, et cela s'appliquait bien sûr aussi aux aumôniers. Sur la ligne de front, des lieux de culte très simples – des chapelles de front – avaient été aménagés ci et là et faisaient simplement partie du labyrinthe des tranchées. Mais les églises près du front étaient également disponibles. Les brancardiers étaient censés écouter ce qui préoccupait les soldats, les encourager, partager leurs souffrances. Ils devaient être une source d'inspiration au milieu du sentiment général de dépression et de bouleversement moral. De plus faire face aux critiques, aux moqueries et à l'opposition ouverte des soldats aigris et de leurs commandants faisait également partie de leur vécu.

    Progression de sa propre vie spirituelle

    A propos de leur formation au C.I.B.I. d'Auvours, nous avons déjà mentionné qu'en plus de la préparation à leur tâche d'aumônier ou de brancardier, beaucoup de temps et d'attention étaient également consacrés au maintien de la vie spirituelle des jeunes Scheutistes. Grâce aux efforts du P. Albert Gueluy et d'autres confrères qui séjournèrent à Fatines près d'Auvours, des leçons, des conférences et des exercices spirituels furent organisés pour ceux qui iraient bientôt au front. Ces derniers eurent également accès à de la littérature spirituelle.

    Au printemps 1916, le P. Albert Van Zuyt, mandaté par le Supérieur général Florent Mortier, avait acheté une maison pour la congrégation, la Villa Héloïse au Tréport, une petite ville sur la côte française entre Dieppe et Amiens. Albert Gueluy continua à séjourner à Fatines tandis que le P. Mortier  confiait le soin spirituel des soldats du front à Albert Van Zuyt. Dès lors, les hommes du front durent correspondre régulièrement avec le P. Van Zuyt et, entre autres, rendre compte de leurs revenus et de leurs dépenses. La plus grande partie de cette correspondance a été conservée et constitue une riche source d'informations sur la période troublée de la guerre. Pendant leurs périodes de permission, les soldats étaient invités au Tréport afin de retrouver un minimum de paix extérieure et intérieure. Et ils en ont fait usage le plus possible ! Les Scheutistes de front s'efforçaient de prendre congé  surtout au moment des grandes fêtes, pour célébrer ces journées à la manière fraternelle de Scheut.

    Les Scheutistes de première ligne étaient également encouragés à se réunir tous les mois pour ce que nous appellerions aujourd'hui une « récollection » : conférence d'un des aumôniers, lecture de quelques articles des Constitutions de Scheut, célébration de la messe, repas. Le reste de la réunion se passait en des « réjouissances scheutistes» !

    Les confrères-aumôniers coopéraient autant que possible à la formation spirituelle des Scheutistes du front. Non seulement ils tenaient occasionnellement une conférence spirituelle, mais ils louaient aussi des salles où les Scheutistes de leur division pouvaient se réunir et ils essayaient de leur fournir des livres de lecture spirituelle.

     

    « Un jour, à l'entrée de l'église de Hoogstade, un soldat s'approcha de moi, hors d'haleine ; L’Adoration du Saint Sacrement venait de se terminer et tout le monde était déjà parti.

        • Puis-je encore me confesser, aumônier ? (chaque mot était interrompu par un soupir, et en y regardant de plus près, je remarquais qu'il était rempli de boue)
        • Certainement, mon garçon, entrez, il y a un confesseur assis au confessionnal à gauche.
        • Bien, parce que c'est terrible. Nous sortions des tranchées et en cours de route nous avons été bombardés par de gros obus, plus qu'il n'en fallait pour tous nous tuer. Je suis tellement heureux d'en être sorti. Trois gars ont été tués, plusieurs blessés. J'ai jeté mon vélo dans le cantonnement et j'ai marché droit vers l'église.

    (témoignage de l'aumônier de l'armée P. Jaak Leyssen, voir Missions de Scheut, 1919, p. 183)

     

    Autres activités

    Depuis Le Tréport, Albert Van Zuyt, en collaboration avec d’autres aumôniers, commença à publier un journal du front pour les Scheutistes. Le premier numéro parut en juin 1916 et le dernier en juillet 1918. Le premier titre en fut « le Scheutiste » et est devenu plus tard « C.I.C.M. » Les aumôniers y écrivaient des articles, et les jeunes du front furent également invités à envoyer au Tréport des nouvelles du front ou d'ailleurs. Le journal fut tiré à 125 exemplaires.

    Certains Scheutistes de première ligne élargirent leurs activités en donnant de l’instruction élémentaire aux soldats ordinaires illettrés : apprendre à lire, à écrire, en français ou en néerlandais. D'autres encore formèrent des chorales ou des groupes de théâtre.

    Pour toute rencontre fraternelle, les Scheutistes étaient toujours les bienvenus chez les Sœurs Bleues de La Panne et ... chez la mère d'Edmond Devloo (également mobilisé pendant un certain temps au front) à Oostvleteren. Une photo prise lors d'une de ces réunions informelles à Oostvleteren, nous est parvenue par les bons soins de la famille Devloo. Nous avons le plaisir de la publier ici. Edmond lui-même est à l'extrême droite. Et au dos de la photo, quelqu'un a écrit « 1916 ».

     

    La fin de la guerre

    « Dans le passé, nous ne connaissions nos missionnaires que par ouï-dire, leur territoire de travail était loin d'ici. La guerre, cependant, les a amenés parmi nous, nous les avons vus dans nos rangs et sur notre propre sol travailler sur un territoire de mission – un champ de bataille ».  (C'est ce qu'écrivait le journal belge « De Standaard » le 18 mars 1919.)

    Lorsque l'offensive finale contre la Triple Alliance commença à l'été 1918, quatre Scheutistes étaient déjà morts. Les deux premiers, Karel Decroo et Maurice Sérulier, tous deux morts à Yvré-l'Evêque en 1915, ont été évoqués plus haut. Deux autres furent tués quelques mois après leur enrôlement dans l'armée : Kamiel Trap et Hector Vandeputte. Eugeen Requette meurt en 1919 dans un hôpital de Rouen des suites de ses blessures. Au cours de l'offensive finale elle-même, d’autres brancardiers furent tués: Leonard Dirckx, Herman Chielens, Karel Rathé; Gaston Devel et Paul Impe, tous deux décédés à Houthulst le 28 septembre 1918. Gervais Toussaint est tué le 9 octobre 1918. Enfin trois autres furent tués en novembre, dans les tout derniers jours de la guerre : Jan Cops, Jozef Tirez et Frans Maes, ce dernier même le 10 novembre, un jour avant l'armistice. Une trentaine de brancardiers ont également été grièvement ou légèrement blessés.

    C'est le triste résultat de la participation d'environ 130 Scheutistes à la guerre en tant que brancardiers ou aumôniers. Mgr Jan Marinis, qui dirigeait depuis septembre 1915 tout le secteur des brancardiers et aumôniers, fit ensuite l'éloge des Scheutistes qui avaient participé à la guerre. Et les autorités militaires elles-mêmes semblaient également satisfaites, étant donné les nombreuses décorations militaires qui ont été décernées à nos confrères.

     

    Démobilisation

    Il n'est pas vrai qu'après le 11 novembre 1918, tous les confrères ont pu simplement retourner immédiatement dans leurs maisons d'étude. Tout d'abord, tous les brancardiers furent rassemblés dans le C.I.B.I. de Furnes et de là déployés dans différents hôpitaux militaires de l'ancienne zone du front pour soigner les blessés de guerre. Cela changea en mai 1919. Certains des confrères brancardiers furent temporairement stationnés dans un « centre pour étudiants militaires » à Bruxelles, une autre partie à Louvain. Le premier groupe fut autorisé alors à poursuivre la formation du noviciat ou de philosophie à la maison centrale de Scheut, les autres purent continuer leur théologie dans notre maison de Louvain. Cependant, tous restèrent des soldats et devaient se présenter en uniforme à la maison de formation. Finalement, en août 1919, c'est la démobilisation générale.


    Nouvelle adaptation à la vie religieuse

    Tout d'abord, remontons le temps. En septembre 1915, la congrégation avait recommencé à accepter des novices, sous la direction du maître des novices P. Arthur Surmont. Chaque année  ces nouveaux arrivants montaient d'un an : d'abord en philosophie, puis en théologie. Cela signifie qu'au cours de l'année scolaire 1918-1919 nos deux maisons d'études de Scheut (noviciat et philosophie) et de Louvain (théologie) furent à nouveau occupées. Or, tout à coup, tout un groupe d'anciens brancardiers s'ajouta à tous les niveaux où ils avaient dû interrompre leurs études en 1915. Il était prévisible qu'il y aurait des problèmes !

    Il a dû être extrêmement difficile pour les ex-brancardiers, après des années de confrontation avec la violence de la guerre et une profonde misère physique et morale au front, d'éprouver de l'empathie pour une discipline religieuse à laquelle ils n'étaient absolument plus habitués. Ils ont dû se plier aux désirs de l'autorité qui n'avait généralement que peu ou pas d'expérience des conditions de guerre. Ils durent s'adapter au rythme d'une vie religieuse qui leur était devenue complètement étrangère. Une vie de prière régulière et intense était au programme, une vie d'étude qui était organisée dans les moindres détails, le silence devait être maintenu et en ce qui concernait la politesse il y avait des façons de faire à rééduquer. Et puis il y eut le fait qu'ils devaient désormais partager la vie avec d'autres jeunes qui n'avaient connu la guerre que de loin et qui se sentaient parfois un peu « dépassés » par ces nouveaux arrivants souvent bien rudes.

    Un élément positif dans tout cela, du moins en ce qui concerne la maison de Louvain, était que les supérieurs de la congrégation y avaient nommé le P. Albert Van Zuyt comme recteur. Par les visites des soldats du front au Tréport et par leurs lettres régulières, P. Van Zuyt les avait suivis jusqu'au bout. Il était donc l'homme idéal pour agir de manière encourageante et conciliante dans une situation souvent tendue à Louvain.

     

    Si la tâche de nos confrères a été multiforme et difficile, leur joie et leur bonheur sincères sont d'autant plus grands qu'ils sont tous revenus au milieu de nous, satisfaits du travail accompli. Endurcis dans leur énergie, ils se préparent maintenant dans nos maisons de Scheut et de Louvain avec un zèle nouveau pour aller un jour combattre le paganisme sur un sol étranger.

    P. Jaak Leyssen dans « Missions de Scheut », 1919, p. 139


    Le courant strict

    Au sein de la Congrégation, il y a toujours eu une certaine tension entre la vocation religieuse et la vocation missionnaire des Scheutistes : un Scheutiste est-il d'abord et avant tout un religieux ou un missionnaire ? C'est surtout dans les années qui ont suivi la Première Guerre mondiale que cette tension a atteint son paroxysme. Beaucoup de choses ont déjà été publiées à ce sujet, nous nous limiterons donc ici à ces quelques réflexions.

    Ceux qui mettaient l'accent sur le religieux avant tout – les adeptes du « courant strict » – aimaient parler du P. Arthur Surmont comme de leur pionnier. Ce dernier avait été maître des novices pendant 19 ans, de 1911 à 1930, et avait clairement marqué les jeunes de l'époque, dont de nombreux jeunes qui avaient rencontré les anciens soldats du front à Scheut et à Louvain. Il s'agissait donc d'un problème supplémentaire pour ces derniers, en plus de tout ce que nous avons déjà évoqué plus haut. Ici aussi, cependant, le P. Van Zuyt et quelques professeurs, dont Jozef Calbrecht, jouèrent un rôle de conciliateurs. Et pourtant, cela n'a pas changé le fait qu'environ 20 anciens soldats aient quitté la congrégation peu de temps après la guerre. D'autres, cependant, sont devenus des missionnaires pleins d’énergie et courageux.


     


    Heureux de travailler et de vivre dans notre communauté de Lubumbashi

    Eric Michael Imbao

    Albertus Padang, cicm
    Intern in DR Congo

    Gaudencio Amaral, cicm
    Intern in DR Congo

     

    Une expérience d’apprentissage de la langue Swahili

    Être missionnaire n’est pas toujours facile. La première chose que je dois maitriser est la langue. Je viens de l’Indonésie où les gens parlent Bahasa la langue nationale en Indonésie. Je n’ai pas l’habitude de parler d’autres langues, mais depuis que je suis entré dans la Congrégation du Cœur Immaculé de Marie, je me suis vu obligé d’apprendre à parler d’autres langues comme l’anglais et actuellement le swahili.

    Depuis que je fais partie de CICM, j’ai appris à quitter ma patrie pour d’autres pays, pour continuer ma vie missionnaire. Dans un premier temps, j’ai dû apprendre les deux langues de la congrégation que sont l’anglais et le français. Comme je viens d’Asie, j’ai appris l’anglais avant d’aller au noviciat, puis en théologie aux Philippines. Après l’anglais, j’ai été nommé missionnaire dans la Province de l’AFA. Cela m’a conduit au Cameroun où j’ai appris une nouvelle langue, le français. Cette langue est importante parce que parlée dans une bonne partie de ma province de mission.

    La vie missionnaire est, pour moi, une réponse à l’appel de Dieu pour servir son peuple. Chaque missionnaire doit donc vivre, disons plonger, dans la vie d’un peuple. Il faut pour cela connaitre sa langue puisque la langue est un pont indispensable entre soi et les gens. Je m’en suis vite rendu compte après mes passages, tour à tour, aux Philippines, au Cameroun et au Congo. Toutes ces expériences m’ont obligé à apprendre la langue de chaque pays pour m’intégrer, mais aussi et surtout, pour entrer en contact avec la culture des gens. C’est un grand défi que d’apprendre ces différentes langues, l’une après l’autre. Mais comme la vie missionnaire exige l’apprentissage de la langue du peuple vers lequel nous sommes envoyé, il n’y a aucune excuse pour s’en dispenser. Je me suis donc préparé en conséquence pour affronter les défis liés à l’apprentissage de la langue de ma nouvelle terre de mission qui est Lubumbashi où J’ai été envoyé. A notre arrivée, les gens étaient très contents de nous accueillir et nous nous sommes vus encouragés de commencer notre apostolat.

    Mais il fallait avant tout connaitre cette terre de mission où je venais d’arriver. Lubumbashi est la deuxième ville du Congo après Kinshasa la capitale. Deux langues y sont parlées, le français et le swahili. Mais la langue la plus parlée est le swahili. Je rappelle que je venais à peine de terminer l’apprentissage du français au Cameroun quand j’ai pris mon vol pour le Congo. Je n’avais donc pas bien maitrisé le français alors que je me voyais obligé de me lancer dans l’apprentissage d’une autre nouvelle langue. C’est un grand défi pour moi car il est difficile de maitriser deux langues en même temps.

    Voici comment l’enseignement du swahili est organisé pour moi et mon compagnon Gaudencio Amaral. Nous avons commencé l’apprentissage de cette langue avec deux professeurs. Je commençais le cours avec mon professeur de 13h30 à 15h30 et Gaudencio, avec le sien de 15h30 à 17h00. Le début fut très difficile car nos professeurs étaient souvent pris par beaucoup d’autres choses et ne disposaient pas suffisamment de temps pour nous enseigner. Après un mois, on a décidé de changer des professeurs. Père Jean Paul Kasengu a trouvé un nouveau professeur pour nous deux et chacun à son tour. Gaudencio étudiait dans l’avant midi et moi dans l’après-midi. Après un mois d’apprentissage, nous avons commencé peu à peu à nous débrouiller et à faire de petites conversations avec les gens. Mais je pense qu‘un mois n’est pas suffisant pour maitriser une langue. Il nous reste encore deux mois d’apprentissage et aussi le programme d’immersion dans des familles d’accueil, pendant trois mois, pour améliorer la langue.

    Dans le souci d’améliorer mon Swahili, au niveau personnel, j’ai décidé de me lancer dans les lectures au cours des messes matinales dans notre communauté et à la paroisse. J’ai aussi intégré une chorale de la paroisse afin de pouvoir apprendre les mots contenus dans les chants. Même en chantant, j’éprouve aussi des difficultés car le swahili est une langue à ton.

    Je tire deux grands acquis qui resteront gravés dans mon cœur. Premièrement, Dieu est présent dans les moments difficiles. Dans ces moments, je peux me retirer et prier Dieu afin qu’il me donne la force de continuer dans mon cheminement vocationnel pour servir le peuple vers qui il m’a envoyé. Comme il est écrit dans la lettre aux Hébreux, 13,5 : « Je ne te laisserai ni ne t’abandonnerai. » Aussi quand je vis de bons moments seul ou au milieu des gens, je rends grâce à Dieu qui est toujours de mon côté. Je me sens tellement béni en tout ce que je suis, je vis et fais : c’est le fruit de la providence divine.

    Le deuxième acquis est la présence de mes confrères  et le soutien du peuple de Dieu. Les professeurs sont très gentils. Ils m’aident à apprendre et à améliorer mon swahili afin d’avoir de bonnes conversations avec les gens. Les confrères sont là pour m’accompagner et me guider tout au long de ma formation. Je me sens reconnaissant de tout cela. Je prie Dieu de m’accorder plus de grâces et de mettre sur mon chemin des personnes de bonne volonté qui puissent m’aider à avancer dans ma vie missionnaire et religieuse pour sa plus grande gloire et le salut des hommes. - Albertus Padang

     

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    Une expérience de vie dans la communauté CICM

    Je me nomme Gaudencio Amaral, de nationalité indonésienne et stagiaire dans la Province CICM de l’Afrique Australe (AFA). Depuis quelques mois, je vis une expérience pastorale jumelée à l’apprentissage de la langue swahili à Lubumbashi, sous la houlette du Père Jean Paul Kasengu, Curé de la Paroisse Notre Dame de Guadalupe. Ce petit article est, pour moi, un moyen par lequel je peux partager avec vous mes expériences mais aussi mon vécu de la vie communautaire.

    Comme je l’écrivais plus haut, je fais mon stage à la paroisse Notre-Dame de Guadalupe, dans l’Archidiocèse de Lubumbashi. Mon arrivée et celle de mon compagnon Albertus a rendu notre communauté multiculturelle et internationale. Notre curé et accompagnateur local, le Père Jean Paul Kasengu, est congolais, tandis que mon compagnon de longue date Albert et moi-même sommes indonésiens. Bien que nous ayons des origines, des races et des cultures différentes, nous vivons et travaillons ensemble comme des frères dans l’accomplissement de notre mission. Vivant dans cette communauté depuis près de sept mois, je trouve personnellement que la dynamique de notre vie ici est vraiment vivante et très enrichissante.

    Le premier aspect que je voudrais partager est la vie de prière. En tant que missionnaires religieux, nous sommes des hommes de prière, donc la prière est très importante dans notre vie et notre mission. Le temps de prière est indispensable à notre vie missionnaire. Notre mission est celle du Seigneur et, en dehors de Lui, nous ne pouvons rien faire. Dans notre communauté, nous avons la prière communautaire et la messe tous les jours. Lundi, mercredi et vendredi, nous avons la messe matinale avec les chrétiens. Pour les mardis, jeudis et samedis, nous avons la messe dans notre communauté. Le soir, dans un esprit de fraternité, nous prions ensemble les vêpres. Pour moi, cet exercice spirituel m’aide beaucoup à grandir dans ma foi et à me rapprocher davantage de Dieu qui est mon véritable soutien et la force dans la mission.

    Autrement dit, je ne peux négliger Dieu, parce que ma prière et mon travail missionnaire sont inspirés par Lui sous l’action et l’impulsion de son Esprit Saint. Le deuxième aspect qui est très important, et que j’aime le plus après la vie de prière dans notre Congrégation, est la fraternité. Comme le dit notre devise,

    « un seul cœur et une seule âme », nous partageons nos expériences chaque jour autour d’une bouteille de bière à midi et le soir à 21h00. Je dois reconnaitre et avouer que le Père Jean-Paul est pour moi un modèle véritable de missionnaire CICM. Dans sa simplicité, il partage ses expériences et nous montre aussi comment nous devrions vivre notre vie en communauté. Bien qu’il soit très pris par le travail pastoral, il trouve toujours du temps pour être avec nous pendant le repas et la prière communautaire. Il se rend aussi toujours disponible pour écouter nos difficultés, et parfois il nous donne des conseils et nous corrige s’il le faut. Ce qui nous encourage dans notre marche à la suite du Christ. Il est certes vrai qu’il n’est pas facile de vivre au sein d’une communauté internationale et multiculturelle, mais avec un peu d’ouverture et d’abnégation, j’ai pu apprendre à m’adapter, intégrer et aimer les habitudes culturelles du milieu dans lequel je vis présentement. Ce qui me fait dire aujourd’hui avec fierté que je suis très heureux de travailler et de vivre dans notre communauté de Lubumbashi. - Gaudencio Amaral


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